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AU
COUCHANT DE LA MONARCHIE[1]

XIV.[2]
LA CHUTE DE NECKER


I

Aux derniers jours d’avril 1781, la situation de Necker n’était pas sans similitude avec celle de Turgot, cinq années plus tôt, jour pour jour. Comme Turgot, en effet, il avait contre lui les parlemens, animés d’une pareille rancune, une partie des privilégiés et une moitié du ministère, à savoir MM. de Maurepas, de Vergennes et de Miromesnil. De ces trois collègues de Necker, le premier l’abhorrait par jalousie sénile, les deux autres le combattaient au nom de leurs principes, ou plutôt de leurs préjugés, en hommes d’ancien régime hostiles d’instinct à toute réformation profonde. Comme Turgot également, Necker était soutenu par l’opinion publique, c’est-à-dire non seulement par les salons et les bureaux d’esprit, mais par la bourgeoisie et par la masse du peuple, qui avaient mis en lui leurs dernières espérances.

Là cependant s’arrête l’analogie. Un examen plus détaillé révèle d’importantes dissemblances. Marie-Antoinette, en effet, qui détestait Turgot, penchait, comme on sait, pour Necker. Elle résistait même, sur ce point, aux suggestions d’une partie de

  1. Copyright by Calmann-Lévy 1912.
  2. Voyez la Revue du 1er décembre.