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cet effet de deux facteurs principaux : le régime douanier et l’organisation commerciale. Les droits protecteurs existent aux Etats-Unis. Le parti républicain, qui est au pouvoir, les a toujours maintenus et parfois aggravés. Il est possible qu’un retour du parti démocrate aux affaires en amène l’abaissement. Ce retour lui-même paraît de moins en moins improbable, à mesure que le président républicain accentue sa campagne contre les grands chefs d’industrie, qui étaient jusqu’ici ses partisans et ses soutiens. Mais, d’autre part, les manufacturiers redouteront la réduction du tarif douanier qui sera sans doute un des articles de la « plate-forme, » c’est-à-dire du programme du parti démocrate aux prochaines élections. Un certain nombre d’entre eux pourront se trouver alors dans un étrange embarras.

En dehors de cette question, quelle serait la situation des industries « trustées ? » Là où des organisations plus ou moins complètes ont englobé dans une direction unique nombre d’usines travaillant les mêmes matières et fournissant des produits analogues, que se passera-t-il, le jour où les combinaisons savantes, patiemment édifiées pendant des années, seront détruites par la Cour suprême, en vertu d’une interprétation de la loi Sherman ? Il ne faut pas croire que la baisse des produits serait une conséquence nécessaire de ces dissolutions. Les trusts n’ont pas suivi une politique de hausse des cours, qui eut depuis longtemps rendu leur existence impossible : certains d’entre eux au contraire, comme celui du pétrole, se vantent d’avoir abaissé le prix de la marchandise dans une proportion énorme, grâce à la perfection de leur mécanisme. La Corporation de l’acier, qui d’ailleurs ne contrôle guère plus de la moitié de la production sidérurgique, a toujours été modérée dans la fixation de ses prix de vente. Si des élémens régulateurs d’une puissance pareille viennent à disparaître, il est probable que les mouvemens des cours seront beaucoup plus violens, dans les deux sens, qu’auparavant, et il est malaisé de prédire le résultat de cette révolution. A la longue, il paraît bien peu probable que l’effet doive en être désastreux pour le pays : l’intérêt de la grande communauté américaine au maintien de la prospérité économique est si évident que l’on a peine à concevoir l’établissement définitif d’un état de choses essentiellement différent de la situation actuelle.

L’étatisme et l’interventionnisme commencent à devenir