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Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 7.djvu/428

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En effet, celle-ci assure aux feux qui la composent le droit de possession de leurs parcelles, sans toutefois leur laisser une entière liberté dans l’exploitation de la terre. Or, chaque modification du faire valoir, même la plus insignifiante, devient difficile ou impossible, dès que le propriétaire est privé d’initiative et n’a pas la certitude d’un travail productif, c’est-à-dire dont les résultats acquis lui soient garantis. Supprimer ces motifs d’activité, c’est affaiblir ou anéantir l’impulsion qui pourrait entraîner les paysans à réaliser une innovation quelconque. Par suite d’une dispersion excessive des parcelles de terrain, le feu héréditaire est privé de ces mobiles puissans, de ces motifs d’action si nécessaires au progrès d’exploitation du sol ; il se voit ainsi condamné à rester stationnaire, ou peu s’en faut. Le morcellement a deux causes principales : la dispersion des petites parcelles isolées, et leur enchevêtrement dans d’autres propriétés. La dissémination des parcelles sur une surface considérable rend le travail improductif et paralyse à l’avance tout l’ensemble des mesures culturales ; leur étroitesse, et leur contact avec d’autres parcelles appartenant à de nombreux propriétaires, créent des conditions spéciales où l’initiative personnelle du paysan est presque réduite à l’impuissance, même dans ses manifestations les plus intelligentes.

Cette extrême division de la glèbe limite étroitement les améliorations techniques susceptibles d’être apportées dans l’exploitation. La plupart des procédés capables d’assurer l’augmentation de la production, pour des propriétés réunies, perdent tous leurs avantages si l’application en est faite sur des parcelles éloignées ; ainsi, l’accroissement de la récolte par les fumures ne peut même être envisagé parce qu’il ne compenserait pas le temps et le travail nécessaires pour le transport de l’engrais. Si des améliorations aussi simples rencontrent des obstacles, combien de difficultés ne surgissent-elles pas lorsqu’il s’agit, par exemple, de l’application d’un assolement intensif !

Cependant, les conditions défavorables à l’exploitation, qui sont la conséquence de la dispersion des terres sur une grande étendue, n’excluent point la possibilité d’innovations parfois importantes. Au prix d’un travail supplémentaire, le possesseur de parcelles disséminées pourrait réaliser de bonnes mesures, comme les engrais employés en temps opportun,