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Après trois mois et plus d’éloignement, je te dis maintenant : à tout à l’heure.

À toi, cher vieux frère.


A Monsieur Charles Busson.


Paris, ce mercredi (décembre 1875).

Si je ne vous ai pas écrit depuis notre retour, quoique j’en aie eu le désir souvent, c’est que j’ai vraiment employé mes jours minute par minute. De peinture point. Sauf trois petits tableaux livrés sur six, les autres sont tels que je les avais rapportés de Saint-Maurice. J’avais hâte d’en finir avec mon livre, et, Dieu merci ! le voilà terminé. Il commencera à paraître dans la Revue des Deux Mondes le 1er janvier prochain ; vous voyez que je n’ai pas perdu de temps.

Malheureusement, vu la grosseur du travail, cela va durer de numéro en numéro jusqu’en mars, ce qui est bien long.

Je suis content, autant qu’on peut l’être d’un livre qui manque d’ordre et n’est point complet. Le titre que j’ai choisi : les Maîtres d’autrefois, et le plan de l’ouvrage, se prêteraient à beaucoup d’extension ; et ce sera peut-être le cadre de travaux futurs, si Dieu me prête vie, courage, loisirs et esprit. Je crois qu’il y aura des gens ennuyés, et c’est ma seule ambition. Je ne suis ni rancunier, ni méchant, mais si je pouvais inspirer à quelques-uns des doutes sur eux-mêmes, convaincre d’autres qu’ils sont des imbéciles, et enfin faire entrevoir qu’un homme du métier n’est pas de trop pour parler de certaines choses, je serais payé de ma peine.

J’attends ce soir même les premières [épreuves ; c’est vous dire que le gros travail de composition est fini, mais que le fastidieux travail des corrections ne le sera pas de longtemps…


Les Maîtres d’autrefois, enfin mis au point, paraissent dans la Revue des Deux Mondes du 1er janvier au 15 mars 1876, en volume au mois de mai. L’ouvrage est très lu, très commenté dans la presse, dans les salons et surtout dans les ateliers. Il obtient un vif succès. Aussi l’auteur caresse-t-il de nouveau à ce moment l’idée qui lui était chère d’étudier la plume à la main les Maîtres du Louvre. Il s’agirait de raconter une promenade autour du grand Salon carré. Fromentin s’en ouvre à quelques amis.