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trouver dans les églises et les collections publiques ou particulières des tableaux de Ferrari ; mais, sur le chemin de Varallo, à quoi bon rechercher les œuvres secondaires de ce peintre ? J’ai préféré occuper mes loisirs à flâner dans les petites rues et surtout à faire le tour de la ville.

Parmi les très nombreuses cités italiennes qui ont transformé leurs rem paris en avenues ombragées, je n’en connais aucune qui ait su en tirer un meilleur parti. Ce n’est pas ici un simple boulevard circulaire, planté de marronniers que brûle l’été et dont l’aspect est si lamentable en septembre ; c’est une véritable ceinture de jardins et de pelouses avec des arbres superbes. Autour des ruines du château aux murailles rouges couvertes de lierre, il semble qu’on erre à travers les allées d’un vieux parc. Au Nord et à l’Ouest, la vue s’étend jusqu’à la merveilleuse ligne des Alpes déployées en éventail autour des campagnes lombardes ; c’est presque le même panorama qu’on aperçoit des toits de la cathédrale de Milan et qui arracha ce cri à Elisée Reclus : « Quand par une claire matinée de soleil, on voit, du haut du dôme de Milan, la plus grande partie de l’immense amphithéâtre se dérouler autour de la plaine verdoyante et de ses villes innombrables, on peut s’applaudir d’avoir vécu pour contempler un tableau si grandiose. » D’ici, on distingue même mieux le massif du mont Rose qui, par les temps clairs, se détache très net à l’horizon. Parfois, aux heures chaudes de la journée, lorsque les premières montagnes sont noyées dans la brume, il émerge seul, ainsi qu’une terre de rêve au milieu de je ne sais quel océan ; et, le soir, quand l’ombre bleue gagne déjà la plaine, il flamboie tout rose, presque irréel, fleur vermeille dans le crépuscule.

Les chutes du jour, contemplées du haut de ces jardins de Novare, s’emplissent de sérénité. Et je n’ai gardé que le mauvais souvenir d’un concert où la fanfare municipale, entre deux airs de la Tosca et de la Bohême, exécuta le finale de l’Or du Rhin. Dans le Wagner comme dans le Puccini, fit rage un admirable, mais terrible piston-solo, qui doit remporter les premiers prix aux concours, mais qui a l’étrange tort de considérer tous les morceaux comme des fantaisies écrites pour son instrument.

Quant aux soirées, elles sont délicieuses, dans ces jardins nocturnes propices aux ombres enlacées, lorsque s’avive le désir