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À ce langage que nous reconstituons d’après les rapports diplomatiques, le chevalier Giansante ne pouvait répondre. Il dut courber la tête, n’ayant d’autre ressource que de le transmettre à sa cour et de le répéter quelques jours plus tard au marquis de Gallo lorsque ai diplomate fut rendu à Vienne.

Du peu que nous savons de la première audience que lui accorda l’Empereur, il faut retenir que c’est lui qui apprit à François II les désastreuses nouvelles qu’à peu de jours de là, les lettres éplorées de Marie-Caroline allaient apporter à sa fille : les défaites de l’armée napolitaine, la rentrée des Français à Rome, leur marche sur Naples et le départ de la famille royale pour Palerme. L’Impératrice était présente à cette entrevue. Au spectacle de la douleur que lui causait l’infortune de ses parens, son mari se montra sensible aux efforts qu’elle fit pour le convaincre de la nécessité de porter secours au roi son beau-père. Le langage qu’il tint à Gallo se ressentit plus encore de l’estime et de la confiance qu’il professait pour lui que de l’irritation dont s’était inspiré celui qu’il avait tenu à Giansante. Mais, après cette manifestation de l’amour filial, la politique reprit ses droits. Lorsque Gallo voulut aborder la question des secours, en démontrer l’urgence et en faire préciser la forme, l’Empereur allégua la nécessité d’y réfléchir, ajourna sa réponse et le renvoya à Thugut.

Reçu par ce ministre, et bien qu’ils fussent liés d’amitié, le diplomate napolitain entendit recommencer les plaintes elles reproches déjà formulés par l’Empereur. Thugut insista sur les conséquences funestes de la campagne entreprise par le Roi contre la France, funestes pour ses alliés comme pour lui. L’une de ces conséquences, et sans doute, il ne manqua pas de la faire valoir, pesait déjà sur la maison de Savoie dont l’expédition de Rome avait précipité les malheurs. Dans cette expédition, le Directoire avait cru voir la main de l’Autriche et le signal de la rupture du traité de Campo-Formio. L’armée de la République occupait alors le Piémont ; elle tenait le roi de Sardaigne prisonnier dans Turin sa capitale, et le soupçonnant d’avoir participé à ce complot, il en avait profité pour annexer purement et simplement le Piémont à la France en obligeant ce malheureux prince à se réfugier dans son île de Sardaigne.

Aux argumens de Thugut, le marquis de Gallo opposa les siens. Ils se résumaient en un seul tiré des événemens dont