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de la reconnaissance, — des privilèges. Un préteur impérial gouverne alors Mulhouse, assisté d’un vice-préteur et de douze conseillers, dont huit choisis parmi les familles nobles de la Haute-Alsace, seigneurs de Zu-Rhein, de Dornach, de Ferrette, de Gliers, entre autres, qui habitaient en grand nombre dans des hôtels, appelés cours, telles que la Cour de Lorraine, la Cour des Trois-Rois, la Cour du Chapitre, et quatre dans les familles bourgeoises notables, qui formèrent plus tard une véritable classe patricienne.

Elle n’était pas encore ville libre : elle le devint quand en 1293 l’empereur Adolphe de Nassau ordonna de prendre désormais le préteur impérial parmi les bourgeois. En même temps, une véritable charte énonça les privilèges accordés à ces derniers. Tout bourgeois, par exemple, libre de sa personne et capable de gouverner, ne pouvait, en vertu d’aucune réclamation, être appelé devant un tribunal étranger, ni inquiété de manière quelconque, ni puni dans la ville même à moins d’un jugement régulier. Son domicile était sacré et inviolable : il ne pouvait y être appréhendé ou fait prisonnier, de jour ou de nuit : sur sa demande, un tribunal s’établissait devant sa fenêtre, et le bourgeois répondait de sa fenêtre aux questions. Apte à être investi de toute espèce de fiefs et à en jouir suivant le droit féodal, dispensé de tout duel avec un campagnard, exempt des droits de péage dans toutes les villes impériales, il pouvait posséder des armoiries et participer à des tournois.

Les bourgeois se constituèrent alors en tribus ou corporations dont les chefs étaient, de droit, membres du conseil de la cité. Il y en eut six, celle des tailleurs, où entraient les drapiers, les tisserands, les armuriers, les passementiers, les apothicaires, les relieurs ; celle des vignerons où entraient les hommes lettrés, les maîtres d’école, les ecclésiastiques et les habitans non bourgeois ; celle des bouchers où entraient les tanneurs, cordonniers et selliers ; celle des boulangers où entraient les menuisiers, les aubergistes, les cordiers ; celle des forgerons où entraient les maçons, les charpentiers, les peintres ; enfin celle des laboureurs. Les deux tribus les plus considérables étaient celles des vignerons et des laboureurs.

À l’ordinaire, quand une ville impériale avait conquis ses privilèges, elle ne cherchait plus qu’à rompre les liens qui