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C’est surtout en poésie que s’applique le proverbe : Qui se ressemble s’assemble. Le poète des Médaillons et des Petites Orientales est un « gamin tendre. »

Et il s’est si bien mis tout entier dans ses vers, que, pour peu que nous y prêtions quelque attention, nous pouvons retrouver, à travers ces deux petits volumes, en germe sans doute, mais parfois plus qu’en germe, toute une partie de son œuvre ultérieure. La Ballade des poètes vivans en l’an 1878, c’est l’un des premiers articles de la Revue Bleue sur le Mouvement poétique contemporain ; Phthisica, — il nous l’a confié, — c’est le Mariage blanc ; Severa, c’est l’Aînée. Les sonnets sur les Moralistes français, et sur Quelques autres, sont une première épreuve des délicieuses « figurines ; » l’un d’eux, — sur Fénelon, — est en raccourci le livre qu’il consacrera plus tard à


L’Utopiste chrétien frotté de miel attique.


Il y a, dans ces sonnets intitulés Lares, pour caractériser tel ou tel écrivain, de bien jolis vers, de bien piquantes et justes formules, et qu’il reprendra en prose. — Vauvenargues :


Le plus jeune parmi les saints de la pensée.


Bossuet :


 Défenseur et captif altier du rite ancien.


La Fontaine :


Libre songeur perdu dans un monde oratoire.


Et que dites-vous de cet exquis Racine ?


J’eus ce rêve. Aux jardins bleuâtres d’Idalie,
Bérénice, et sa sœur Monime en voile blanc,
Roxane aux yeux creux, Phèdre, une blessure au flanc,
Traînaient leurs pas muets et leur mélancolie.

Leurs robes d’or éteint, leur corps frêle qui plie,
Leur souffrance sans cris, leur parler noble et lent,
Leurs gestes las, avaient comme un charme dolent
D’élégance fanée et de grâce pâlie...

Mais autour de leur col et sur leur sein de lait
Maint collier de très purs diamans ruisselait
D’une splendeur toujours jeune, toujours divine.