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ladite fillette, d’abord parce que c’est ridicule, puis parce que cela ne correspond pas à la réalité. Veiller soigneusement chez Pierre et Simone à cultiver raisonnablement « le sens du respect ; » leur démontrer combien il est juste et utile. Tout en dressant l’enfant à agir par lui-même, tout en développant au mieux sa culture, ne négligeons pas de lui faire, de temps en temps, toucher du doigt les limites de son faible pouvoir, de son savoir débile. Il n’en résultera pour lui ni humiliation, ni découragement, si nous avons soin de lui dire chaque fois : « Mon enfant, le temps, maître que rien ne supplée, reculera peu à peu ces étroites limites, à la condition que tu ne le braves pas, que tu n’affectes pas de te passer de lui. »


Secondement, l’absence de vergogne. — Elle est un résultat de l’absence de respect ; l’autorité des parens ayant fléchi, les enfans ne se gênent plus en leur présence. Mais l’absence de vergogne a d’autres causes. D’abord, un affaiblissement général de ce qu’on nommait naguère « les convenances. » Naguère, les convenances régnaient, presque au-dessus de la morale. Une jeune fille, une femme, une famille se discréditaient, autant que par un grave désordre, si elles passaient outre certaines règles de toilette, de langage, de tenue, de fréquentation, règles admises sans discussion par tout le monde. Du jour où l’on a discuté lesdites règles, beaucoup d’entre elles n’ont pas résisté ; malheureusement, certaines règles défendables, fondées en raison, ont été balayées du même coup, et, depuis ce 89 des convenances, chacun se juge libre de dénoncer les convenances qui ne lui conviennent point. L’une des plus gênantes, pour les parens, était de se contraindre en présence de leurs enfans. Elle est abolie… Les enfans en profitent pour ne se point gêner en présence des parens. Liberté réciproque de paroles et d’allures.

Autre cause destructive de la vergogne : on a abattu, entre l’éducation des jeunes gens et celle des jeunes filles, la cloison étanche. On a très bien fait, vous savez là-dessus mon opinion. Mais il va sans dire que le mélange des garçons et des filles, dans l’enfance et surtout dans la jeunesse, requiert de la part