Ce n’est pas uniquement par la diffusion de théories philosophiques et d’utopies humanitaires que la France du XVIIIe siècle a agi sur les colonies espagnoles de l’Amérique, et concouru à leur émancipation. À cette propagande par les idées correspondit la propagande par l’action personnelle des nombreux représentans de l’aristocratie française, qui partirent pour les Indes Occidentales à la recherche d’une cause à défendre, de terres nouvelles à explorer, ou, plus simplement, d’une aventure à courir. La participation de la noblesse française à l’indépendance des Etats-Unis n’est que l’épisode le plus célèbre de la croisade continentale. Bientôt notre Révolution donne une intensité nouvelle à cette influence indiscutée, en ajoutant, à la force de l’exemple et des doctrines, le contact avec le sol américain de nombreux émigrés, qui n’ont pas rejoint l’armée des princes, ou qui, à l’opposé de Chateaubriand, ont abandonné Coblentz pour traverser l’Océan.
Parmi ces existences plus ou moins romanesques de gentilshommes déracinés, bien peu atteignent la grandeur dramatique de celle de Jacques de Liniers. Il naquit à Niort le 25 juillet 1753,