princesse Charlotte ne se lassait pas de protester en faveur de sa mère, ni non plus de braver toutes les défenses qu’on lui faisait de la voir. Ainsi la princesse de Galles était partie, en août 1814 ; et alors avait commencé pour elle une série d’aventures plus ou moins excentriques, qui s’étaient prolongées jusqu’au lendemain de la mort du vieux George III. Mais voici que, durant l’été de 1820, elle avait appris que son mari, devenu maintenant le roi George IV, se refusait à laisser introduire le nom de sa femme dans les prières publiques ordonnées à l’occasion de son avènement : sur quoi la nouvelle reine s’était hâtée de revenir en Angleterre, malgré la menace d’un procès qui, disait-on, ne manquerait pas d’aboutir à la démonstration formelle de son indignité.
Et, vraiment, le procès s’était ouvert devant la Chambre des Lords. Avec l’aide de deux avocats non moins remarquables par leur caractère que par leur talent, Thomas Denman et le futur lord Brougham, Caroline avait à se justifier d’une accusation d’adultère infiniment plus sérieuse, à coup sûr, que ne l’avait été celle de 1807. Une vingtaine d’anciens serviteurs italiens de la princesse, mandés à Londres sur l’ordre et aux frais du gouvernement royal, affirmaient que leur maitresse avait entretenu des relations illicites avec un personnage de condition inférieure, le « courrier » Bartolomeo Pergami, dont tout le monde savait en effet qu’elle avait obtenu pour lui le titre de baron, et l’avait longtemps accueilli dans son intimité.
Le Roi lui-même et ses ministres, à la lecture des révélations que s’offraient à faire ces divers serviteurs congédiés de Caroline, avaient eu la certitude que celle-ci n’oserait pas remettre le pied en Angleterre. Puis, lorsqu’elle était revenue, ils s’étaient sentis absolument sûrs de sa condamnation, avec ce terrible faisceau de preuves qu’ils possédaient contre elle. Mais devant la Chambre des Lords, sous les habiles questions et confrontations de Brougham, le faisceau s’était éparpillé de la façon la plus imprévue. Presque tous les témoins s’étaient contredits, ou bien avaient été surpris à mentir, ou encore avaient déclaré ne plus se souvenir de rien. Piteusement, le ministère avait dû retirer sa plainte ; et lorsque Caroline était morte, quelques mois plus tard, le 7 août 1821, épuisée de l’effort passionné qu’elle avait poursuivi depuis son retour, l’indignation de plus en plus prononcée du peuple anglais était sur le point de contraindre le gouvernement à rétablir le nom de la Reine dans la liturgie.
C’était, pour Caroline de Brunswick, une grande victoire, complète et décisive. Mais depuis lors l’opinion des historiens n’a plus voulu