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et le mien surtout, est de combattre les idées fausses, d’indiquer quelques bonnes voies aux esprits curieux, de montrer que la diplomatie n’est pas si aisée que l’on puisse en traiter dans tous les journaux et tous les cabarets, mais qu’elle n’est plus si mystérieuse que les peuples ne puissent s’en dégager ; qu’il faut ici dégager les vocations où elles se trouvent, réformer la carrière ; mais que le pays doit pousser à la roue et que si les Français ne voyagent pas, n’étudient pas, ne jugent pas les choses en elles-mêmes et par eux-mêmes, ne savent pas ce qu’ils veulent et n’y travaillent pas, chacun modestement et en sa place, on n’arrivera à rien.

Je me heurte à des difficultés de tout genre, les méfiances de l’autorité qui sont très grandes, les préjugés du public qui sont énormes. Cela ne m’effraie pas. J’aborde ces questions avec un esprit si vraiment dégagé de toute considération personnelle que je suis sûr de m’en tirer, sinon à mon avantage, au moins à mon honneur, à force de sincérité.

Je n’ai qu’une inquiétude, le manque de temps et de préparation. La chose, sur ce point-là, est tombée mal à propos. Le rédacteur du Nord est absent jusqu’au 15 février, j’avais promis de le remplacer la veille même du jour où j’ai été demandé par l’École libre. Tu sais que je suis scrupuleux ; je veux tenir ma promesse. Je continuerai donc, avec quelques écoles buissonnières, jusqu’au 15 février cet intérim de fonctions irritantes pour un homme qui n’aime pas à perdre son temps. Je préparerai jusqu’au 1er janvier mes quatre premières leçons en me donnant bien du mal ; du 15 janvier au 15 février je trouverai encore le temps d’écrire mes notes ; à partir de ce moment, je me trouverai coi, je ne saurai plus rien. Une semaine suffit à préparer une leçon, mais une semaine entière et non les deux heures et demie qui me restent le matin avant d’aller à Versailles. Je demanderai donc un congé, et c’est pour le demander sans scrupule de conscience que je me livre en ce moment à un excès de travail.


4 janvier 1872.

... Enfin, je suis en atelier où le feu est allumé et il faudra bien qu’il en sorte quelque chose.


ALBERT SOREL.