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REVUE DRAMATIQUE


Théâtre Sarah-Bernhardt : Kismet, conte arabe en 3 parties de M. Knoblauch, traduit par M. Jules Lemaître. — Odéon : Faust, adapté par M. Emile Vedel. — Théâtre-Antoine : L’homme qui assassina, pièce en 3 actes, tirée du roman de M. Claude Farrère par M. Pierre Frondaie. — Gymnase : La Femme seule, pièce en 3 actes, par M. Brieux.


Je l’attendais. J’attendais ce Kismet que M. Guitry a monté avec le luxe et le soin que vous savez. Je l’attendais sans impatience, comme on attend ce qu’on est sûr de voir venir à l’heure dite. Je l’attendais, non pas seulement parce que la pièce, en tournée à travers l’Europe, ne pouvait manquer d’être jouée à Paris, un jour ou l’autre, mais parce, qu’il était juste et équitable qu’elle fût représentée chez nous et comme elle l’a été, parce que cela était dans l’ordre, dans la logique et dans la nature des choses, en conformité avec le mouvement qui se poursuit dans notre théâtre et que cette exhibition sensationnelle illustre magnifiquement. Sous des influences qui, pour la plupart, ne sont pas des influences françaises, et pour des causes dont j’essaierai tout à l’heure d’indiquer quelques-unes, on est arrivé progressivement, — je ne dis pas dans les théâtres de féerie et dans les music-halls, mais dans les théâtres « littéraires, » — à donner une importance de moins en moins grande à ce qui jadis était le principal, le texte de la pièce, et à augmenter d’autant celle du cadre et des accessoires : décors, figuration, costumes, jeux de lumière, spectacle, danse et musique. Avec cette pièce, nous voici au terme de l’évolution : il n’y a plus de pièce, il n’y a que des décors. Ces décors sont splendides : c’est un cadre merveilleux autour d’un tableau absent. Ainsi Kismet, à défaut d’autre signification, a du moins celle-ci : il symbolise cette manie moderne, la folie de la mise en scène.

Le « conte arabe » de M. Knoblauch, qui n’est pas un auteur allemand,