cas de guerre, au point de vue des transactions financières des belligérans. Récemment soulevée à la Société d’Economie politique de Paris, elle y a donné lieu à des débats intéressans, dont la conclusion a été qu’il convenait de laisser la plus grande liberté possible aux nations qui ne sont pas engagées dans la lutte. En tout cas, nous sommes ici sur un terrain où la responsabilité du gouvernement n’est pas entière ; on conçoit qu’à la rigueur il puisse s’opposer à l’émission publique, sur son territoire, d’un emprunt, bien qu’il n’existe guère, à notre connaissance, de textes de loi formels qui autorisent cette intervention. Mais de quelles armes dispose-t-il pour empêcher des banquiers ou des particuliers d’acquérir des titres d’un Etat étranger, en particulier les bons que pourrait émettre le Trésor de cet Etat ? L’organisation moderne des marchés financiers a rendu le capital monnayé plus fluide que jamais. L’adoption de l’étalon d’or, en droit ou en fait, par la plupart des grandes nations modernes, diminue beaucoup les risques d’emploi de fonds au dehors : jointe à la merveilleuse facilité des communications de toutes sortes, elle abaisse les barrières et permet à ceux qui désirent emprunter de frapper à bien des portes qui leur étaient jadis fermées. Si les conditions du prêt sont avantageuses, si le taux offert est élevé, les garanties suffisantes, le banquier sollicité conclura l’opération, à moins qu’il ne juge que des raisons de haute politique la lui interdisent. Souvent d’ailleurs, ce n’est pas directement entre le débiteur et le créancier que les négociations se poursuivent : nous avons vu récemment des banques suisses, qui avaient escompté des bons du Trésor hongrois, les offrir à leurs correspondans français. Des bons japonais, souscrits à Londres en 1904 et en 1905, avaient été apportés à Paris par des financiers anglais. C’est ainsi que, sur une même place, il arrive que se négocient concurremment des obligations portant la signature des adversaires qui sont aux prises. Il est de notoriété publique que la Turquie, au Cours de l’année 1912, a recueilli des fonds en France et que, à la même époque, la Bulgarie, sans réussir à y émettre le grand emprunt qu’elle projetait, obtenait une avance partielle, qui a été doublée après la signature de l’armistice de Tchataldja. Des bons serbes ont trouvé leur chemin dans les portefeuilles français. La Grèce, qui avait émis un emprunt « de prévision » dès 1910, avait commencé les hostilités avec une encaisse particulièrement bien
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