mal contons d’estre en la subgection de la Seigneurie de Venise. »
Voilà ce qu’au commencement du XVIe siècle on disait de notre pays dans le Levant, et de nos jours, il suffit encore de parcourir l’Orient, Chypre en particulier, pour se convaincre une fois de plus, malgré le dire de certains écrivains, que l’histoire de France remonte à plus de vingt ans. Partout nous retrouvons des traces palpables du passage de nos aïeux, ces grands colonisateurs du moyen âge. Sans orgueil mal placé, mais aussi sans fausse modestie, nous pouvons nous en faire gloire, — car malgré bien des défaillances qu’il serait puéril de chercher à cacher, ces hommes, guidés par un même idéal, furent des légistes perspicaces, des artistes excellens, des soldats valeureux et des organisateurs hors de pair.
Parmi toutes les merveilles laissées par nos ancêtres, éparses sur le sol de l’île, l’incomparable Famagouste tient certainement le premier rang et c’est donc à elle que j’ai été d’abord, en venant de Larnaka par une radieuse après-midi de printemps.
Le printemps des îles de la Méditerranée orientale a toutes les fraîcheurs, toutes les tendresses du nôtre ; mais il a en plus, pour le faire chanter, le ciel le plus pur de nos meilleures journées d’été ; surtout après les courtes pluies qui, en cette saison, tombent de temps en temps.
Au-dessus de la campagne plate, jonchée de renoncules jaunes, de marguerites d’or et d’asphodèles, on aperçoit tout à coup, à l’extrême horizon, les hautes tours de la cathédrale Saint-Nicolas elles sommets d’églises, dont les pieds sont cachés par un rempart bas, à peine visible, à cause des talus de la contrescarpe. Arrive-t-on devant quelque ancienne ville d’Occident ? ou est-on, comme on l’avait pensé, dans le Levant ? On aurait bien de la peine à le dire si des têtes de palmiers ne venaient trancher la difficulté. C’est une vieille ville de France, née sur la terre d’Orient, au bord de la mer, qui m’est apparue là-bas, rappelant ces illustrations des contes de fées qu’enfans, le soir après le dîner, on mettait entre nos mains, pour que nous restions sages. Elles nous enchantaient, ces images, je m’en souviens si bien !
L’antique cité se précise davantage et devient une réalité au fur et à mesure qu’on s’en rapproche. Certains sites, comme certaines personnes, demandent à être vus de loin pour