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celui que j’ai décrit dans mon chapitre sur Cassiciacum. Si Vérécundus eut, ici, sa villa, je ne me suis pas trompé beaucoup, en la cherchant sur la ligne de Lecco à Milan.

Le palazzo moderne, qui l’a remplacée, a sans doute des parties très anciennes, mais déguisées et devenues à peu près méconnaissables sous un jupon de style 1830. Néanmoins, le régisseur tient à me faire visiter des sous-sols, où il s’obstine à voir la cuisine de sainte Monique. J’avoue que le seul aspect des lieux décourage tous les efforts de mon imagination pour le suivre sur cette piste. Il y a bien une cour entourée d’un promenoir à colonnes toscanes, avec des tentures de grosse toile rougeâtre, dans les entre-colonnemens, qui rappelle de loin l’atrium d’une maison romaine. Ce n’est qu’une vision fugitive. Presque tout le revêtement du logis est conçu dans le gothique oxfordien le plus pur. Aimable revenant, le genre troubadour ici m’environne. Il ne me choque point. Je sais que je suis au berceau même du romantisme italien. Cassago n’est pas loin du lac de Côme, cher à Manzoni, qui plaça sur ses rives les principales scènes de ses Fiancés. Et je songe aussi à tout ce qu’il y eut de romantique dans l’âme ardente et troublée de saint Augustin.

Le curé me ramène à ce grand saint, en me montrant, dans les archives du presbytère, un curieux document rédigé, en latin, d’une belle écriture diplomatique, où il est dit, que, dans les premières années du XVIIe siècle, la paroisse de Cassago fut préservée de la peste, grâce à l’intercession du « pontife d’Hippone, Hipponensis pontificis : » ce qui confirme l’existence d’un culte traditionnel de saint Augustin dans la région. Enfin le 20 août, sa fête y est célébrée avec une solennité qu’elle n’a nulle part ailleurs.

Rappelons-nous maintenant les autres faits invoqués par les archéologues : la pierre légendaire encastrée dans la maçonnerie de l’autel, la fontaine de saint Augustin, le nom d’Aurelianum donné à un quartier du village. Est-il besoin d’autres preuves, pour nous assurer que nous sommes bien, ici, à Cassiciacum ? Évidemment, aucune de ces preuves n’est absolument concluante et certaine. Mais pourquoi est-ce à Cassago seulement qu’on rencontre ces faits et ces traditions ? Pourquoi la mémoire du saint y est-elle toujours vivante, — et cela depuis des siècles ? Il faut bien qu’il y ait quelque chose. Si, d’autre part, le site et la topographie ne contredisent point les allusions