Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 17.djvu/631

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

séjourner à leurs frais jusqu’à exécution complète des travaux. »

Ces interventions supérieures ne se manifestaient en général qu’à l’occasion d’un déplacement princier ou pour l’avantage personnel du monarque, en France comme à l’étranger : Charles-Quint se rendait-il de Bruxelles à Anvers et Matines (1555), on envoyait des chevaucheurs de l’écurie ouvrir les champs, chercher lieux convenables et couper arbres pour en faire des ponts afin que Sa Majesté pût passer facilement. Et comme Louis XIV n’aimait la chasse à courre qu’avec des routes commodes, il en fut ouvert 360 kilomètres dans la forêt de Fontainebleau à une époque où, dans l’ensemble du royaume, il ne s’en faisait guère.

Depuis Sully pourtant, un personnel administratif, qui précéda de cent quarante ans les ingénieurs techniques de Louis XV, avait été timidement organisé pour présider aux « ponts et chaussées : « sous le titre nouveau de « Grand Voyer de France, » — nous dirions aujourd’hui ministre des Travaux publics, — le surintendant des finances de Henri IV pouvait bien délivrer dans chaque généralité des commissions de « Lieutenans de la grande voirie, » de « cheminiers » ou « voyeurs-réformateurs des chemins ; » mais comment ces nouveaux venus se feront-ils obéir par les populations, battus en brèche comme ils vont l’être par les Etats provinciaux, les parlemens, les trésoriers de France, toutes autorités qui, de vieille date, se partagent en droit la surveillance de la voirie, bien qu’en pratique la plupart n’en aient cure.

Et d’abord, où prendra-t-on les fonds ? A qui incombe la dépense ? Aux seigneurs seuls, répondent certaines paroisses déniant, comme celles du fief de Turenne, tout concours au syndic de la vicomte. Aux propriétaires riverains, disent les Etats de Bretagne qui se refusent à voter un centime, bien que Sully leur offre au nom du Roi une subvention égale à la somme dont ils s’imposeraient eux-mêmes. Pénétrés des mêmes idées, les Etats de Normandie (1610) prescrivent aux possesseurs de fonds limitrophes des grandes routes « de les rétablir chacun en droit soi, » de les aplanir en nivelant les buttes qui bosselaient le sol, de les affermir avec cailloux, terres et gravois et, en attendant que les cavées et autres mauvais passages soient réparés, de faire ouverture de leur clos pour le passage des charrettes et chevaux. Inutile de dire que semblables mandemens