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mieux dire « parti démocratique français ? » Cette seconde dénomination est incontestablement plus large, mais convient-elle à un parti qui aspire à se purifier par élimination ? « Nous exprimons, dit M. Caillaux, la démocratie qui travaille et qui, ne se repaissant pas de chimères, veut à la fois l’ordre et le progrès dans la République. » Qui ne serait volontiers d’un tel parti ? « Avant tout, par-dessus tout, dit encore M. Caillaux, il faut se dégager de la politique de clientèle. » Combien nous sommes de cet avis ! C’est la politique de clientèle qui a déshonoré le parti radical et radical-socialiste. Depuis qu’il est au pouvoir, il n’en a pas fait d’autre, et Dieu sait avec quelle âpreté impitoyable il a constamment pratiqué celle-là ! Lui demander d’y renoncer est assurément le meilleur des conseils qu’on puisse lui donner, mais aussi la plus rude condamnation qu’on puisse lui infliger. Ce n’est pas M. Combes qui aurait tenu un pareil langage, lui qui a été l’initiateur de cette politique de débauche où les radicaux ont si vite perdu leur vertu et ont fait perdre la leur à tant d’autres. M. Caillaux prêche le retour aux principes, ce qui est avouer qu’on les a désertés. « Il faut, dit-il, déterminer un programme de réalisations immédiates assez précis et assez mesuré tout à la fois pour qu’on puisse dire que quiconque ne l’acceptera pas n’est ni un républicain, ni un démocrate sincère. » Par malheur, et on s’en doute, nous cessons, bien que républicain et démocrate, d’être d’accord avec M. Caillaux lorsqu’il précise. À la vérité, il le fait le moins possible, et, en dehors de la réforme fiscale où il est personnellement engagé, rien n’est plus vague que son programme.

Que dit-il, par exemple, de la loi militaire ? On sait l’attitude qu’il a prise pendant la discussion : en présence de l’énorme développement militaire des Allemands, il a été d’avis que nous devions mettre une « rallonge » à notre armée et s’est contenté de dire que celle que proposait le gouvernement était trop longue. Voici maintenant son langage avant le congrès : « Il me semble qu’un parti comme le nôtre, qui est, qui doit être un grand parti national, qui, s’il a toujours protesté contre l’exploitation du patriotisme si souvent tentée par d’autres, a dans ses traditions, dans son histoire, la défense de la patrie et de la liberté française, qui furent également menacées, à certaines heures, par l’étranger et par ceux qui se joignirent à lui, a le devoir d’exiger une organisation plus complète, plus méthodique, de la défense nationale, organisation qui, plus étroitement liée à la conception de la nation armée, exclurait tout gaspillage d’hommes et d’argent. » La phrase est longue et traînante,