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par des fagots de sapin, et nous ne nous enrhumons jamais ici, mais il en serait autrement pour vous.

L’affection vit de sacrifices, — elle en impose beaucoup : elle m’impose celui de vous dire la vérité sur tous ces détails avec la franchise et la prudence d’un vieux père de famille !

Mais je ne renonce pourtant pas à vous voir, si ce n’est chez moi, du moins sur votre route. Veuillez étudier, avec l’aide de votre Indicateur et de votre carte de France, le plan de voyage que j’ai dressé sur la feuille ci-jointe.

J’ai supposé : 1° que vous arriverez à Paris comme vous me l’annonciez demain mardi soir ; 2" que vous tenez à partir pour Rome par le paquebot direct qui doit quitter Marseille dimanche, à ce que vous me dites, car je n’en sais rien ; 3° que vous ne tenez pas à rester à Paris plus d’un jour.

J’ai donc combiné un plan d’après lequel, en partant toujours par le train express et en ne voyageant pas de nuit, vous pour- riez me donner un jour que nous passerions ensemble à Dijon, ville assez intéressante, où il y a beaucoup de monumens à voir pour vos enfans, un évêque qui déteste la Hongrie et que j’ai dû prêcher à ce sujet, — et un hôtel supportable. — Si cette idée vous sourit, j’irais vous rejoindre à Montbard, seule station rapprochée de vous où s’arrêtent les trains express : nous ferions route ensemble jusqu’à Dijon où nous passerions la nuit et la journée du lendemain.

Pendant ce temps-là, votre oncle qui, en sa qualité de Sarmate, doit savoir braver les cahots et les chevaux boiteux, irait à la Roche-en-Breny voir ma femme qui l’appelle à grands cris et prétend (ce dont je doute un peu) qu’il n’hésitera pas à se fatiguer pour elle. S’il ne craint pas de voyager la nuit, cela est très faisable, car en repartant d’ici, il arriverait à Dijon après votre départ, mais vous rejoindrait à Lyon par le même train qui vous conduira le lendemain matin à Marseille.

Malheureusement, le temps vous serre de trop près et ne nous laisse pas le moyen de combiner et de consulter. J’espère bien que vous recevrez cette lettre dès mardi soir. Dans tous les cas, il faut m’écrire par la poste de mercredi. Je recevrai votre lettre jeudi matin, et si vous acceptez mon plan, je partirais aussitôt pour vous rejoindre à Montbard, jeudi à 3 h, 51. Ne manquez pas de mettre la tête à la fenêtre de votre compartiment, quand vous serez arrivée à cette station, afin que je