Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 18.djvu/375

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ce n’est pas le canton de Montignac, c’est le département de la Dordogne que nous félicitons d’un choix si honorable et d’une acquisition si précieuse. » L’auteur de cet article est François Lamarque, — naguère M. de Lamarque, avocat au parlement de Paris, — maintenant Lamarque tout simplement et juge au tribunal du district de Périgueux, plus tard conventionnel, député aux Cinq-Cents, — et chevalier de l’Empire. Peut-être Joubert a-t-il connu à Paris ce Lamarque. Et l’article de ce Lamarque n’est pas une merveille. Le rédacteur écrit assez vite ; il emploie des formules souvent médiocres. Mais je crois apercevoir qu’il fait sa rédaction sur des notes qu’on lui a fournies ; et je crois que ces notes viennent de Joubert lui-même : je crois l’y reconnaître au personnage qu’il trace de lui et qui est bien le personnage qu’il voulait être, comme en témoigne ce brouillon de 1799 que j’ai analysé précédemment. La préférence qu’il a donnée à la philosophie sur la fortune au temps des anciennes places, son peu d’empressement pour une célébrité qu’il a mieux aimé mériter qu’obtenir : tout cela est de lui. Sans doute, ne venant pas à Montignac pour sa campagne électorale, avait-il envoyé du moins les éléments de ce qu’on devrait dire de lui.

Mais il est élu : il n’a plus qu’à venir. Il attendit que fût apaisé le tumulte auquel avait donné lieu, malgré lui, son élection. Et il partit pour Montignac, je suppose, au commencement de février.


En tout cas, il était à Montignac le 6 mars. Ce jour-là, solennellement, il prêta son serment de juge de paix ; devant la municipalité assemblée avec le conseil de la commune dans la chambre du conseil.

Joubert a trente-huit ans bientôt. Il est grand et mince. Comme juge de paix, il ne porte point un costume particulier. L’Assemblée constituante a supprimé, pour les magistrats, la robe, uniforme d’ancien régime et qui convenait dans l’ « édifice monstrueux de la chicane, » Elle tint à honneur de ne donner aucun costume particulier aux juges de paix, cela pour des raisons un peu risibles et charmantes, « attendu que leurs fonctions sont toutes fraternelles et pacifiques et que le bien qu’ils sont à portée de faire à leurs concitoyens est suffisant pour leur attirer la considération publique sans qu’il soit nécessaire