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arrêtés à Libourne le 26 décembre n’ont pu être définitivement expédiés que ce jour 1er janvier[1]. »

Ainsi Joubert avait très bien emporté l’affaire. Dans leur arrêté (daté, non du 26, mais du 25 décembre 1792), les commissaires de la Convention s’appuient sur « l’exposé qui leur a été fait au nom des citoyens de six cantons sur sept composant le district de Montignac : » ils ne citent pas nommément Joubert, comme ne le cite pas le district, sur le registre où il copie l’arrêté des commissaires. Et l’on ignorerait son initiative, sans la trouvaille de cette lettre. Il n’aimait point à faire montre de lui-même ; et, comme il se plaisait à publier ses écrits sans les signer, cette activité cachée était celle qu’il désirait.

L’arrêté des commissaires de la, Convention fut enregistré à Montignac le 5 janvier 1795. Il résume évidemment les argumens fournis par Joubert. Il note que Terrasson est à l’extrémité du département, que Montignac est central, et plus peuplé, plus fréquenté ; il invoque les décisions prises par l’assemblée électorale de Montignac. Il note,— et c’est assez gai, — que l’un des cinq juges élus au renouvellement ; des tribunaux, « né à Terrasson et y habitant, » y tient des audiences, tout seul, et y prononce des jugemens, élevant ainsi, de son autorité privée, tribunal contre tribunal. Il ordonne, « au nom de la Convention nationale et en vertu des pouvoirs à nous délègues par les décrets, » que le tribunal soit établi à Montignac ; que le juge récalcitrant y vienne et que le greffe soit transporté à Montignac[2]. Grâce à Joubert, Montignac triomphe.

Terrasson ne se soumit pas facilement. Le juge récalcitrant, Élie-Guillaume Bouquier, frère cadet de Gabriel Bonquier le conventionnel, refusait de quitter sa ville natale. La municipalité révoquait en doute les pouvoirs des commissaires de la Convention et gardait les papiers du greffe. Le citoyen Nicolas Sorbier, commissaire national, adressa au district une pétition tendant à suspendre les officiers municipaux de Terrasson. Le district fit connaître aux commissaires « l’acte incivique et désobéissant » de ces officiers : il avait pris un arrêté de suspension, qu’il espérait voir confirmer par le Département. Il fallut écrire au Procureur général, lui envoyer un gendarme, le

  1. Collection du Sorbier.
  2. Archives de la Dordogne, L. 518.