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on trouve un prétexte présentable, on livrera assaut au ministère. Mais M. Barthou est homme à se défendre, comme il l’a déjà prouvé. Le jour de la rentrée, la Chambre n’a pas pu s’empêcher de rire en entendant M. Paul Deschanel lui lire la liste des demandes d’interpellations déposées pendant les vacances : elle était interminable. M. Deschanel a demandé à M. le président du Conseil s’il avait une proposition à faire au sujet de l’ordre dans lequel ces interpellations seraient discutées : après avoir fait remarquer qu’aucune d’elles ne portait sur la politique générale, M. Barthou a déclaré qu’il se souciait infiniment peu des numéros d’ordre qu’on distribuerait aux autres. Il n’y a pas d’interpellation sur la politique générale : le croirait-on ? Après les congrès de Pau et de Grenoble, les radicaux et les socialistes, qui ont si violemment accusé le ministère de pactiser avec la droite et d’aller à la réaction, n’ont-ils donc pas des comptes à demander à M. le président du Conseil ! Ils en ont, certes, seulement l’intrigue n’est pas mûre, la campagne n’a pas été encore assez préparée, l’occasion propice n’a pas été trouvée ; mais nous ne perdrons rien pour attendre, et M. Barthou non plus. On aiguise dans l’ombre le couteau du sacrifice.


La situation extérieure ne s’est nullement éclaircie depuis quinze jours. Nous parlions alors de l’ultimatum adressé par l’Autriche-Hongrie à la Serbie. On pouvait se demander alors si cette démarche, imprévue pour les Puissances de la Triple Entente, était un de ces actes impulsifs dont le Cabinet de Vienne a déjà donné quelques exemples, ou s’il fallait y voir le commencement d’une politique nouvelle que les Puissances de la Triple Alliance inauguraient de parti pris. La question était encore incertaine à ce moment ; elle l’est moins aujourd’hui.

L’étonnement qu’on avait éprouvé à Londres, à Saint-Pétersbourg et à Paris était à peine dissipé lorsqu’une démarche du même genre, quoique atténuée dans la forme, a été faite à Athènes, par les ministres d’Autriche et d’Italie. On a appris en outre qu’ultimatum et démarche avaient été approuvés par l’Allemagne et que la Triple Alliance était plus unie que jamais. Le gouvernement allemand conseillait la modération un peu partout, mais il était pleinement d’accord avec ses deux alliés, et la modération qu’il conseillait, quand il s’agissait de la Serbie et de la Grèce, consistait pour celles-ci à céder aux sommations ou aux avertissemens qui leur étaient adressés. Avant de caractériser la situation nouvelle que semblent devoir