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Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 18.djvu/483

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Mais, cette fois, la règle a fléchi, soit parce que le Pape en a spontanément atténué la rigueur, soit parce que la poussée a été trop forte pour qu’il fût possible d’y résister. La nouvelle règle a été fort sage. Le Pape n’a nullement poussé à la constitution d’un parti catholique à la Chambre : au contraire, il s’y est montré défavorable, préférant l’influence à l’action directe, qui est parfois gênante et même compromettante. Le mot d’ordre donné aux catholiques a été de soutenir le candidat modéré dans les circonscriptions où il était en danger et de s’abstenir dans les autres. Il a été suivi. Les catholiques ont donné leur concours à un grand nombre de candidats, dont quelques-uns n’étaient modérés que par comparaison avec leurs concurrens ; mais ils ne l’ont pas donné gratuitement, ils ont fait signer aux candidats qu’ils adoptaient la promesse de ne pas voter un certain nombre de lois, la loi du divorce, par exemple, ou celle qui supprimerait l’enseignement religieux dans les écoles. Par cette tactique, les catholiques se sont assuré le moyen de jouer le rôle de modérateurs entre les partis, et la physionomie de la législature qui s’ouvre en sera certainement influencée. Les catholiques ont obtenu un autre succès, très retentissant, à Rome même, dont le maire, M. Nathan, libre penseur et franc-maçon pratiquant et intolérant, a été battu avec les siens à une grande majorité. La municipalité de Rome, désavouée par ses électeurs, a dû donner sa démission : c’est là une leçon dont nos sectaires de France devraient faire leur profit. M. Nathan semblait tout-puissant à Rome, et il l’était en effet jusqu’à la veille des élections : le lendemain, il n’était plus rien. Sa défaite n’est pas due seulement aux catholiques ; tous les libéraux étaient excédés du despotisme de M. Nathan ; mais les catholiques bénéficient de ce succès, qui s’ajoute à ceux qu’ils ont obtenus ou qu’ils ont assurés ailleurs.

Ce premier essai du suffrage universel a produit des résultats, dont les uns étaient prévus, mais dont les autres l’étaient moins : les premiers ont été la victoire du gouvernement, les seconds la position nouvelle prise par les catholiques. Les catholiques ont compris que le suffrage universel, dans l’état où sont les esprits en Italie, leur donnait une force qui serait très grande, s’ils avaient l’habileté d’en user sans en abuser. Quant aux partis et au gouvernement lui-même, ils n’ont pas hésité à négocier avec eux. Tout n’est-il pas combinazione en Italie ? Mais quel scandale pour nos radicaux !


En Espagne, dès sa première rencontre avec le Sénat après la rentrée parlementaire, M. le comte de Romanonès a succombé ren-


ren-