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renoncé à ses mesures surannées. La concurrence si redoutable que lui font dans ces pays d’autres nations, et surtout l’Allemagne, trouvera là une cause nouvelle de développement victorieux.

Les commerçans britanniques sont des gens trop avisés et trop doués de sens pratique pour ne pas sentir ce danger imminent qui ne manquera pas d’emporter leurs dernières hésitations, et comme conséquence nous serions fort surpris si, avant une dizaine d’années, le parlement britannique n’adoptait pas comme une mesure de salut national le système métrique obligatoire. Ainsi on aura vu ce paradoxe déconcertant de la nation la plus industrieuse du monde, de celle qui a plus tôt, sinon aussi loin qu’aucune autre, lancé dans l’univers les bouleversemens et les réformes les plus hardies, qui a créé dans le monde moderne la liberté de pensée, la liberté individuelle et le droit des peuples à se gouverner, qui a produit Cromwell, Newton, Darwin, entraînée bon gré mal gré dans le sillage révolutionnaire du système métrique par la vieille Chine stagnante et le Siam indolent ! O bizarreries de l’histoire !

Si même l’Extrême-Orient ne suffisait pas à convaincre à cet égard la vieille Angleterre, c’est l’Empire Britannique lui-même, ce sont les colonies anglaises qui se chargeraient d’y pourvoir. Plusieurs d’entre elles et non des moindres se disposent à prendre une série de mesures qui ne tendront à rien moins qu’à favoriser le commerce d’importation des nations concurrentes de l’Angleterre au détriment de celle-ci, si elle n’adopte bientôt le système métrique. Depuis longtemps, parmi les colonies britanniques, l’île Maurice et les Seychelles possèdent le système métrique. Il vient d’être déclaré obligatoire à Malte à partir du 1er juillet 1914. En Egypte, il est obligatoire depuis 1892 dans les transactions avec les administrations de l’État. Mais ce n’est pas tout : l’union Sud-Africaine, dont sir Frederick Bramwell écrivait récemment : «... Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour empêcher l’introduction du système métrique dans l’Afrique du Sud, car les mesures britanniques y créent une obstruction à la vente des machines continentales et, aussi longtemps qu’elle conservera les mesures britanniques, nous aurons un avantage marqué sur nos concurrens... » l’union Sud-Africaine s’apprête à adopter une loi qui admet, en première ligne et avant le système britannique, le système métrique, et qui est une préface nécessaire à l’adoption prochaine de celui-ci. En outre le Parlement du Commonwealth australien a voté récemment une résolution impérative, qui a pour but de faire adopter par tout l’Empire Britannique le