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XVIIIe siècle à notre démocratie moderne et que le plus grand nombre de nos collègues ont reçue des Louis Blanc, des Michelet, des Victor Hugo. Elle peut paraître erronée ; elle est généreuse, vraie en partie et pour les besoins de la discussion, je l’accepte. Partons de là ensemble.

Il s’agit d’assurer à chaque individu le plus complet rendement de sa personne. (Très bien ! Très bien ! au centre.)

Pour cet effet, vous comptez sur l’école.

Oh ! j’entends bien, sur l’école de demain, complétée par des œuvres postscolaires, suivies elles-mêmes, — nous en avons vu l’essai, — de cours populaires, de promenades dans les musées, de conférences dans les universités populaires, de tout un ensemble de créations qui, dans votre esprit, doivent encadrer, soutenir l’homme tout au long de sa vie et mettre à la disposition de chacun toutes les sciences et tous les instrumens du savoir. !

Eh bien ! quand vous parviendriez à donner à tous les enfans du village le sentiment le plus juste de ce que sont les méthodes scientifiques, quand vous auriez pénétré de rationalisme tous les esprits, vous n’auriez pas donné satisfaction à toutes les aspirations de l’homme. (Applaudissemens à droite. — Mouvemens divers.)

Je vous l’ai déjà dit, ne me plaçant ici aucunement à un point de vue confessionnel, je ne songe ni à contester les droits nécessaires de la raison, ni à humilier celle-ci devant aucun dogme. (Très bien ! Très bien ! au centre.) Je dis simplement qu’il ne faut pas compter sur le rationalisme non plus que sur la science pour cultiver toute l’âme humaine. Il y a une part dans l’âme, et la plus profonde, qu’ils ne rassasient pas et qu’ils ne peuvent même pas atteindre.

Demandez plutôt aux chefs de ce mouvement de libre pensée qui nous emporte. Allez rue Monsieur-le-Prince, Auguste Comte y construisit une église. Allez là-bas, en Provence, vous y trouverez l’oratoire que Stuart Mill y éleva. Stuart Mill, celui que Gladstone appelait le saint du radicalisme ! Tous ne construisent pas des oratoires, tous ne vont pas jusqu’à donner une forme sensible à leurs aspirations religieuses ; mais tous, au terme de leurs travaux, ils trouvent l’inconnaissable et ne se resignent pas à vivre sans aucune espèce de communication avec lui. Ils veulent l’atteindre, s’y abreuver. C’est un besoin profond de leur