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des statues des frontons, quinze métopes et cinquante-six dalles de frise, sans parler des marbres de l’Erechteion et du temple d’Athéna Niké, étaient enlevés par lord Elgin, puis expédiés, exposés à Londres, où ils sont maintenant au British Muséum. Après tant de dégradations, le Parthénon devait encore courir de nouveaux dangers en 1821, pendant la guerre de l’Indépendance, puis en 1827 et en 1833. Ce fut la fin des épreuves infligées pendant des siècles au merveilleux monument. Délabré, éventré, dépouillé de ses sculptures, mais couronnant toujours de la majesté de sa colonnade à demi ruinée le rocher sacré de l’Acropole, le Parthénon est enfin rendu au culte pieux de la Grèce libérée et jalouse de conserver son patrimoine d’art.

Le soir, les rayons obliques du soleil, glissant du Pirée, le long de la plaine, dorent et enflamment le Parthénon. Le rayonnement en est si grand que même ses ruines en manifestent la perpétuité. N’a-t-il pas plus fait pour le développement de la puissance de la Grèce que ses flottes et ses armées ? Elles lui ont valu les sympathies du monde occidental, qui lui ont permis de renaître et de grandir, tandis que les escadres alliées, comme celles d’autrefois, croisent dans la baie du Pirée et saluent cette résurrection d’un peuple qui renaît de son passé.

A l’heure où la pure lumière (ἁγνόν) sacrée aux yeux des Grecs leur communique le mouvement et la vie, comment ne pas se remémorer l’invocation de Renan sur l’Acropole quand il fut arrivé à en comprendre la parfaite beauté :

« O noblesse, ô beauté simple et vraie, déesse dont le culte signifie raison et sagesse, toi dont le temple est une leçon éternelle de conscience et de sincérité ; j’arrive trop tard au seuil de tes mystères... Tu es vraie, pure, parfaite, ton marbre n’a point de tache...

«... Toi seule es jeune, ô Cora ; toi seule es pure, ô Vierge ; toi seule es forte, ô Victoire. Les cités, tu les gardes, ô Promachos ; tu as ce qu’il faut de Mars, ô Oréa ; la paix est ton but, ô Pacifique. O Archégète, idéal que l’homme de génie incarne en ses chefs-d’œuvre... »

La lumière ! la lumière ! partout on la retrouve éclatante, partout elle est l’objet du culte des Grecs. Comme sur le Parthénon, elle illumine de nouveau les Ruines de Delphes[1], l’antique domaine d’Apollon, désormais rendu au Dieu du Soleil, par les fouilles faites depuis cinquante ans, et dont M. Emile Bourguet, ancien élève de l’École française d’Athènes, nous fait connaître toutes les péripéties et les résultats. Là aussi la cella a réapparu et, dans le temple de structure

  1. Fontemoing.