Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 19.djvu/195

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Tandis que les alliés attaquaient Penne à Belleghem et d’Audenarde à Sweveghem, une colonne ennemie venant de Deynze et forte seulement de 1 200 hommes, menaçait sur la route de Gand le poste de Harlebeke ; mais, grâce surtout aux excellentes dispositions qu’il sut prendre, le colonel de Lastours s’y était maintenu sans peine.

Des faits qui s’étaient déroulés pendant cette journée et du dénombrement des forces que son adversaire lui avait présentées sur chacun de ces trois points : Belleghem, Sweveghem et Harlebeke, forces partout doubles des siennes, il semblait clairement résulter pour Maison que l’ennemi, débordant sa droite par Rolleghem, l’attaquerait, le lendemain, en deux colonnes. Or les engagemens de Belleghem et de Sweveghem coûtaient déjà au 1er corps 180 tués, blessés ou disparus, et le général en chef ne se souciait pas de risquer une nouvelle affaire dans le seul dessein de garder Courtrai, position facile à attaquer, mais difficile à défendre, et qu’il ne jugeait pas essentiel de conserver. Il résolut donc aussitôt de quitter cette ville au jour naissant, mais fut moins prompt à se fixer quant au chemin qu’il devait suivre.

Une idée qui ne se présenterait peut-être point à l’esprit d’un docte théoricien militaire, mais une idée étrangement téméraire, comme parfois il en naît soudain au cœur d’un soldat, s’empare alors de Maison. Si, laissant à Courtrai une arrière-garde pour amuser l’ennemi, il se mettait en marche avant le jour et suivait pendant une lieue environ la route de Tournai, puis se jetait à gauche pour se faufiler entre cette route et celle d’Avelghem, à travers un pays coupé, fourré, couvert, très favorable à son projet, il tomberait ensuite sur les flancs et les derrières des alliés au moment où ils pénétraient dans la ville par les deux chaussées et en ferait un effroyable carnage. Moins impétueux ou plus sages, deux de ses généraux déconseillèrent à Maison cette entreprise. Il finit par céder à leurs instances, mais, après bien des années, il regrettait encore de les avoir alors écoutés.

Maison n’avait plus qu’à se rapprocher de Lille. Le 8 au matin, le quartier général alla donc s’établir à Roncq, avec le gros de la division Barrois, dont une partie prenait position à Halluin, tandis que la cavalerie se plaçait en échelons sur la route de Menin. Quant à la division Solignac, elle se porta