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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




Le ministère vit encore, et il est de plus en plus probable qu’il continuera de vivre ainsi jusqu’aux élections prochaines, mais il reste peu de chose du peu d’autorité qu’il avait au moment de sa naissance. De dures épreuves lui ont été infligées, soit au Sénat, soit à la Chambre, et il en est sorti moralement ébranlé. Il vit encore, c’est tout ce qu’on peut dire de lui ; mais ses conceptions financières sont à vau-l’eau, à la suite de la discussion du Sénat, et il n’a pu se sauver à la Chambre, après y avoir affirmé le maintien du service de trois ans, qu’après avoir consenti avec les adversaires de la loi une transaction qui ne lui fait aucun honneur. Tel est le bilan de la quinzaine qui vient de se terminer.

Au moment où nous écrivons, le Sénat poursuit encore la discussion de l’impôt sur le revenu, mais cette discussion est assez avancée pour qu’on soit dès maintenant certain qu’une partie considérable du projet restera en route et n’aboutira, s’il doit aboutir, qu’à une date indéterminée. Ce n’est pas ce que M. le ministre des Finances avait espéré, ni ce qu’il avait promis, d’abord à Pau, dans le fameux congrès dont il a été l’inspirateur, puis au Palais-Bourbon, dans l’assaut plein d’arrogance qu’ila livré au ministère Barthou. Tout, alors, semblait facile à M. Caillaux : tout lui apparaît difficile aujourd’hui. Son erreur initiale lui est venue sans doute de l’atmosphère apaisée qui s’était formée autour de l’impôt sur le revenu ; on n’en parlait plus guère, le calme s’était fait, et M. CaUlaux a pu penser, d’après ce silence, que les esprits avaient peu à peu adhéré à la réforme. La vérité était bien différente : on ne parlait plus de l’impôt sur le revenu parce qu’on n’y croyait plus. L’opinion commune était qu’on y avait renoncé, au moins pour un temps, et que d’autres problèmes, plus urgens, plus impérieux, avaient remplacé celui-là. Mais, quanti on