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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/313

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contenu moral, aux œuvres spirituelles qu’avec la grâce l’homme peut et doit faire, il restitue leur prix. Il y a un moralisme dans cette mystique. Qu’on en juge par cette description idéale de nos devoirs contenue dans un petit poème à Jean Baiard, un moine d’Issoire. « D’abord la pureté sereine de l’esprit. — Puis un autre bien sacré, la pénitence... Ajoutez-y une troisième victime, qui nous rendra propice ce Dieu que nous avons offensé : Je consolerai les affligés, je nourrirai largement les pauvres, je viendrai en aide aux malades, je prierai fréquemment en pensée, et, quand j’aurai fait toutes ces choses avec persévérance, j’avouerai que je n’ai rien fait encore, et j’attribuerai pensées et actes plus au Christ qu’à moi-même. » Or, ces œuvres qui « plaisent à Dieu » doivent-elles rester sans récompense ? Maigret, n’hésite point à prononcer le mot. Dans une autre pièce, il écrit : « Le Christ rendra à chacun suivant ses mérites. » — De même encore, Maigret pourra se prononcer contre le culte matériel rendu aux saints, et nier que nous puissions devoir quoi que ce soit à leur intervention directe. Mais il croit à l’effet de leur prière et nous invite à leur adresser les nôtres. Dans une pièce à Gérard Roussel, il louera Dieu et les Bienheureux « qui protègent le royaume de France, et dont le secours nous a donné la victoire. » Il terminera un hymne à saint Etienne par ces vers : « Oh ! regarde d’un visage bienveillant le poète qui fait vibrer sa lyre pour toi. » Surtout, la Vierge aura une place à part dans son œuvre. S’il ne veut pas être de ceux qui l’invoquent d’un cœur intéressé, s’il ne veut penser à elle que pour louer sa royauté céleste, son élection divine, il se réjouira des hommages qu’elle reçoit sur toute la terre ; et lui-même lui adressera cette invocation touchante : « O Vierge, parure du ciel..., toi dont les astres n’égalent point l’éclatante lumière, oh ! ne me refuse point la grâce que je désire. » — Ce chantre de la foi vivante et de la « pure » religion du Christ n’hésitera pas non plus à se prononcer sur les moyens extérieurs que l’Eglise nous offre pour nous sanctifier. Il célèbre la confession. Il parle de l’Eucharistie sous les formes traditionnelles. — Sur ces questions fondamentales : valeur des œuvres, culte des saints, sacremens, point de rupture entre le nouveau christianisme et la vieille Eglise, il entend marquer ses positions et nous dire où il se trouve.

Par ces précisions, Maigret diffère déjà d’un Bourbon comme