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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/404

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à ses portes mêmes, veillait un ennemi implacable, le roi de Numidie, Massinissa. A peine les Romains avaient-ils évacué l’Afrique, que Massinissa prenait l’offensive ; il conquit la Tripolitaine jusqu’aux limites de la Cyrénaïque. Carthage, épuisée par ses luttes contre les Romains, dut se résigner à cette nouvelle mutilation. Une fois de plus, la Tripolitaine changeait de maîtres ; elle devenait numide pour près de cent ans. En 146 avant Jésus-Christ, Carthage était anéantie. Les Romains prenaient pied dans la Tunisie actuelle où ils fondaient la province d’Afrique, tandis que le territoire tripolitain passait successivement au fils de Massinissa, Micipsa, et au fils adoptif de ce dernier, le célèbre Jugurtha.

Telle était la situation lorsqu’en 111, éclata la rupture entre Jugurtha et Rome. La Tripolitaine était excentrique par rapport au théâtre principal de la guerre, et les Romains, déjà en proie à de multiples embarras, étaient peu disposés à étendre encore le cercle des opérations. Pour les décider, il ne fallut rien moins qu’une démarche spontanée des habitans. La ville de Leptis Magna envoya une ambassade à Rome pour solliciter l’alliance romaine : elle l’obtint. Bientôt les circonstances l’amenèrent à demander davantage. Un ambitieux, du nom d’Hamilcar, intriguait pour mettre la main sur le gouvernement de la cité. Pour l’arrêter, le plus sur était d’introduire dans la place une garnison romaine. Une nouvelle députation alla trouver le général en chef Metellus et lui exposa les désirs de la population. Metellus acquiesça à la demande. Quatre cohortes de Ligures, les premières troupes européennes qui eussent paru en Tripolitaine, vinrent s’installer à Leptis.

Jugurtha abattu et la guerre terminée, les Romains n’avaient plus qu’à évacuer Leptis et à se rembarquer ; ils restèrent, sans doute, — l’histoire ne nous le dit pas, — au grand déplaisir de leurs alliés de la veille, déçus, mais impuissans. Toutefois, la Tripolitaine ne fut pas immédiatement annexée à l’Etat romain. Pendant soixante ans, Rome se contenta d’un protectorat plus ou moins déguisé, qui sauvegardait les apparences sans compromettre ses intérêts. En 46, César réglait définitivement la question. Le protectorat faisait place à l’annexion, La Tripolitaine était purement et simplement rattachée à la province romaine d’Afrique.

En Cyrénaïque, les choses se passèrent d’une manière plus