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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/569

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tactique, à parler de l’éventualité d’un duel à part entre les croiseurs de combat des deux partis, ce qui se produirait très probablement dans le cas de bataille rangée entre les deux flottes allemande et anglaise. Celle-ci, en effet, outre les quatre unités de la catégorie qui nous occupe, que l’on nomme volontiers en Angleterre les « croiseurs Dreadnought, » c’est-à-dire, le Lion, la Princess Royal, la Queen Mary et le Tiger, possède une trentaine de croiseurs cuirassés d’âge et de mérites divers, dont les 20 plus récens, — partant les mieux armés, — sont constitués en escadres rattachées à la grande armée navale, la Home fleet, à laquelle la Grande-Bretagne confie, non sans appréhensions secrètes, le soin de sa sécurité immédiate.

Il est clair que, sur ces 20 croiseurs cuirassés, le commandant en chef anglais pourrait en amener au moins la moitié sur le lieu de la rencontre. Si à ces bâtimens nous joignons les 4 croiseurs de combat dont nous venons de donner les noms et qui, par définition, ne s’éloigneront guère du corps de bataille, nous arrivons à une force bien supérieure à celle que les Allemands pourront présenter, puisque ces derniers ne sauraient ajouter à leurs trois croiseurs « Dreadnought, » que 4 croiseurs cuirassés, 6 au plus, appartenant aux anciens types, mais dont les derniers, Von der Tann, Gœben et Moltke sont incontestablement des unités de grande valeur. Ce point reconnu, on ne peut douter qu’avant d’être en mesure d’agir directement, comme nous le disions tout à l’heure, dans les flancs de la ligue des cuirassés anglais, les croiseurs cuirassés ou croiseurs de combat allemands seraient obligés d’en découdre avec leurs similaires du parti opposé. Et comment ne pas admettre que l’avantage resterait au nombre, quand on sait, d’autre part, qu’il ne saurait encore être question d’une supériorité décidée des bâtimens allemands, pris isolément, sur les navires anglais du même rang ?

C’est ce que savent fort bien, chez nos voisins de l’Est, tous ceux qui, officiellement ou officieusement, assument la charge de donner à la Marine impériale ses hautes « directives, » en même temps que celle de préparer le peuple allemand aux sacrifices financiers qu’exige le développement continu de ce coûteux organisme. Aussi a-t-on vu, dès le milieu de l’année qui vient de finir, les chefs de la Ligue maritime signaler, avec une anxiété plus ou moins justifiée, le danger que ferait courir à l’armée