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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/572

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côte d’Ecosse où l’on frapperait durement la marine militaire anglaise.

Quant au point de départ de l’expédition, ce serait sans doute l’un des estuaires de la mer du Nord, de préférence celui de l’Elbe, en communication directe avec la Baltique par le canal Kaiser Wilhelm, et d’autant plus favorable que, d’abord, ce débouché, défendu par les puissantes batteries de Cüxhaven, est couvert de loin par Helgoland ; que, de plus, partant de là, on peut s’élever au Nord en se glissant le long de la côte de la péninsule Cimbrique, tandis qu’une fausse attaque, au large de Borkum et de l’embouchure de l’Ems, attirera vers l’Ouest les bloqueurs anglais.

L’expédition pourra-t-elle, malgré cette feinte, gagner du premier coup le point choisi pour la descente et, par exemple, passer de nuit le détroit de Pentland sans être observée ? Cela n’est pas certain. Une fausse route, dépistant les éclaireurs ennemis, la conduirait alors dans un de ces grands fjords de Norvège auxquels la Marine allemande témoigne depuis quelques années un intérêt que les Norvégiens jugent indiscret et qui lui servirait de très utile relais. Pendant que le gros de l’escadre et les transports s’y reposeraient quelques heures, les puissans et infatigables croiseurs de combat disperseraient, en les rejetant au large, les observateurs trop gênans.

Si beaucoup de militaires et d’hommes politiques anglais jugent très possible une descente des Allemands en Grande-Bretagne, s’ils s’efforcent de diverses façons d’éviter à leur pays cette redoutable épreuve, il ne semble pas qu’il en soit de même chez nous, quand les marins essaient d’attirer l’attention sur l’éventualité d’un débarquement dans le Cotentin, à Morgat, à Quiberon ou dans les îles de Ré et d’Oléron. Nos états-majors, en effet, rejettent en principe les opérations de ce genre, dont ils nient, sinon, à la grande rigueur, la possibilité, du moins et en tout cas, l’efficacité. Au reste, hypnotisés par le danger qui menace d’une manière constante et immédiate la frontière continentale, ils se refusent à donner ou seulement à conserver a la frontière maritime les forces et les moyens de défense qui seraient nécessaires pour assurer son intégrité. La Marine, d’autre part, ne se déclare pas assez forte, — à beaucoup près, — pour concourir d’une manière vraiment utile à la protection des côtes de l’Océan, alors qu’on lui demande de contenir les