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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/672

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pratique, telles ont été les intentions généreuses de ceux qui ont multiplié les établissemens d’enseignement agricole. Les agriculteurs auxquels on voulait rendre service n’étaient pas en état de répondre à cet appel. La déconvenue et la désillusion ont été d’autant plus amères que les sacrifices consentis avaient été plus amples et les espérances plus sincères.

Rien n’est perdu ; il convient d’attendre.

Qu’on se garde bien surtout d’abaisser le niveau des études et de réduire l’enseignement au simple apprentissage de la technique manuelle. Pourquoi les pères de famille enverraient-ils leurs fils dans des écoles où ils n’apprendraient pas autre chose que le maniement d’un outil ou la conduite d’une machine ?

A l’heure actuelle, la partie scientifique des programmes de l’enseignement élémentaire n’est pas trop importante. La « théorie » n’y prend pas trop de place. Peu à peu, très lentement d’abord, plus rapidement ensuite, dans quarante ou cinquante ans, les meilleurs, les plus intelligens agriculteurs comprendront la valeur, c’est-à-dire l’utilité d’un enseignement théorique joint à la technique manuelle. La presse agricole, l’enseignement nomade des professeurs départementaux ou spéciaux, l’influence toute-puissante de l’exemple, amèneront un changement profond dans les idées du public agricole. Il faut pour cela qu’une génération succède à une autre.

Voilà ce qu’il faut comprendre avant de gémir ou de critiquer, en déplorant l’insuccès, — tout relatif d’ailleurs, — des écoles pratiques ou des fermes-écoles.

Nous avons relevé à ce propos, dans un rapport officiel, cette phrase qui exige un commentaire :

« L’enseignement des écoles élémentaires doit être suffisamment développé pour éclairer scientifiquement toutes les opérations culturales ; les travaux pratiques doivent y tendre, non pas à faire de simples ouvriers, mais surtout des praticiens instruits, intelligens, capables de devenir de bons régisseurs, et de diriger une exploitation avec habileté et profit. »

Le ministre a parfaitement raison et l’on ne saurait tracer d’une façon plus raisonnable le programme des études dans une des écoles dont nous parlons. Mais, hélas ! ce qui manque précisément aux élèves diplômés c’est une situation de régisseur ou de directeur de culture. De pareilles positions sont rares, — très rares, — mal rémunérées, et la situation sociale faite à