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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/709

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existences sauvées par la sérothérapie antidiphtérique. La mortalité de cette maladie qui ravageait surtout l’enfance était effrayante ; elle est tombée à presque rien. Et comment se défendre d’une émotion en lisant ces mots qu’écrivait il y a quelques jours le docteur Roux, s’oubliant comme toujours lui-même, à propos du 60e anniversaire de M. Behring que vient de célébrer l’Allemagne, ou du moins la pacifique, savante et rêveuse Allemagne... car il y en a une autre : « C’est une fête non seulement pour l’Allemagne, mais pour tous les pays civilisés... Behring mérite la reconnaissance de toutes les familles françaises qui lui doivent la conservation d’êtres chers. »

Le sérum antidiphtérique n’est pas seulement curatif, mais aussi préventif. Malheureusement, l’immunité préventive ainsi créée est peu durable. Il n’importe guère d’ailleurs, puisque son pouvoir curatif est parfait. On a préparé, sur le même mode, d’autres sérums antitoxiques, et notamment le sérum antitétanique découvert par MM. Behring et Kitasato et dont MM. Vaillard et Nocard ont admirablement précisé l’emploi pour prévenir le tétanos. Le tétanos, qui est une maladie commune à l’homme et aux animaux, a ceci de commun avec la diphtérie que son bacille (découvert par M. Nicolaïer) se limite au point inoculé et ne se dissémine pas dans l’organisme, bien que celui-ci soit tout entier malade. C’est la preuve que le bacille agit non directement, mais par ses toxines. Il est très fréquent dans les couches superficielles du sol, dans les poussières et dans les déjections des herbivores : il produit une raideur musculaire générale, si bien que le malade meurt généralement asphyxié par suite de la contraction tétanique du diaphragme. La sérothérapie n’en est guère efficace que préventivement. Et c’est pourquoi il faut l’employer tout de suite dans les traumatismes et les plaies ayant été en contact avec le sol. Le sérum antitétanique s’est montré d’ailleurs beaucoup plus efficace chez les grands animaux domestiques, pour qui les vétérinaires l’utilisent fréquemment, que chez l’homme.

Contre les venins des serpens et des scorpions qui dans le monde entier tuent certainement environ 50 000 personnes par an, on a forgé des armes analogues à celles qui servent contre les poisons diphtérique et tétanique. Les noms de MM. Sewall, Kaufmann, Phisalix et Bertrand, du docteur Calmette, jalonnent brillamment la route qui a conduit à ce résultat.

En injectant aux animaux des doses progressivement croissantes et convenablement espacées de venins, on arrive à les immuniser admirablement. M. Calmette arrive à immuniser ainsi facilement des