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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/785

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et s’en fournit, d’abord, dans les ateliers contemporains dont Collier et Lajolais lui ont ouvert les portes. En 1865, sa collection moderne de paysages et de tableaux de genres comprend déjà une trentaine d’excellens morceaux dont plusieurs signés par Eug. Delacroix, Jules Dupré, Decamps, Cabat, Théodore Rousseau, Daubigny, Meissonier, Troyon, Ziem, Diaz, Isabey, Gérôme, Jacque, Hébert, etc. Toutefois, dans les grandes ventes, il n’est point insensible à l’attrait des vieux maîtres. En 1865, c’est l’un des plus célèbres chefs-d’œuvre de Rembrandt, l’Homme au grand chapeau (Portrait du Docteur Tholinx), qui entre chez lui pour n’en plus sortir. En 1869, à la vente Delessert, où l’acquisition de la Vierge de la maison d’Orléans, par le Duc d’Aumale exilé, fut saluée d’une acclamation chaleureuse, celle du Portrait de Wille, par Greuze, valut aussi à Edouard André une ovation sympathique.

Il y avait alors déjà quelques années qu’il se préoccupait, non seulement de développer, par la variété et la qualité, la valeur de ses collections, mais surtout de leur préparer et de leur assurer une demeure plus vaste et plus convenable qu’un simple appartement. L’architecte Henri Parent, auquel il avait demandé des plans, était bien l’homme fait pour entrer dans ses vues. D’une vieille famille d’artistes du Nord, rompus, par traditions, à la pratique simultanée de l’architecture et de la décoration, Henri Parent avait eu pour premier maître son père même, Aubert-Joseph. Celui-ci, aussi célèbre comme sculpteur sur bois que comme constructeur, était né à Cambrai en 1750. Émigré lors de la Révolution en Allemagne, puis en Suisse, membre de l’Académie à Berlin, de l’Université à Bâle, il n’était rentré en France qu’en 1815, pour se fixer à Valenciennes où, professeur d’architecture à l’Académie locale, membre correspondant de la Société des Antiquaires de France, il mourut en 1835. Ses sculptures sur bois sont presque toutes des bas-reliefs, très fouillés à la flamande, où les fleurs et les oiseaux jouent un grand rôle autour des médaillons iconographiques : Catherine II, impératrice de Russie (Salon de 1783), Louis XVI (Palais de Trianon). Sa réputation lui avait laissé ouverts chaque année, jusqu’à sa mort, les Salons académiques de Paris, où il s’obstinait à représenter l’art décoratif. Comme archéologue, il était l’auteur d’un « Etat des monumens funèbres érigés dans l’église de Saint-Roch. »