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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/844

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de cette cathédrale dont les voûtes avaient retenti de sa parole enflammée lorsqu’il célébrait, du haut de la chaire, la délivrance d’Orléans et la mémoire de Jeanne d’Arc, il allait voir les armées allemandes fouler un sol sacré.

Ici encore, nous le retrouvons, tel qu’il avait été toujours, se prodiguant pour épargner à ses ouailles, au prix d’efforts de tous les instans, et dans la mesure où il le pouvait, les maux de la guerre. Il intervient auprès du roi de Prusse, pour faire dégrever la ville d’Orléans d’une partie des contributions dont elle était frappée ; il sauve de la mort des paysans qui allaient être fusillés pour avoir tiré sur les troupes prussiennes. Le général von der Thann, commandant les troupes d’occupation, lui dit « qu’il a reçu l’ordre de ne lui faire aucune peine, » et l’évêque ne cesse de trouver auprès de lui un flatteur empressement à satisfaire à ses requêtes autant qu’il le peut.

Il est vrai que ces bonnes dispositions ne se renouvelèrent pas pendant la seconde occupation de la ville. Une victoire passagère de nos armes avait obligé l’armée prussienne à battre en retraite. Lorsque, peu de temps après, elle revint triomphante, von der Thann ne la commandait plus. Il était remplacé par le prince Frédéric-Charles, et, outre qu’on ne pouvait attendre de celui-ci la bienveillance relative dont son prédécesseur avait fait preuve, il considéra que le langage patriotique tenu par l’évêque, pendant la période de délivrance, méritait toutes les rigueurs. Il le garda prisonnier dans le palais épiscopal et, pour l’empêcher de communiquer avec le dehors, il mit deux plantons à sa porte. Réduit à une véritable captivité, Mgr Dupanloup n’eut pour se consoler d’être prisonnier que la triste satisfaction de prodiguer ses soins aux nombreux blessés à qui, dès le début de la guerre, il avait donné asile dans sa demeure transformée en ambulance. La paix conclue, les Orléanais n’oublièrent pas ce qu’avait été leur évêque durant cette période calamiteuse et, à son exemple, tous les prêtres de son diocèse. Ils témoignèrent leur gratitude en l’élisant leur député à l’Assemblée Nationale.

C’était pour lui un rôle nouveau, mais il était préparé à le tenir. D’une manière générale, les questions politiques ne lui étaient pas plus étrangères que les questions religieuses, car jamais son activité n’avait séparé en lui le citoyen du prêtre. A la tribune parlementaire, il allait défendre les intérêts de la