Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 21.djvu/149

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

seulement de la « primauté de droit divin » que l’Église gallicane attribue au chef de l’Eglise universelle. Et quand il indique que tant de réformes fondamentales pour l’Église (élection du clergé, remaniement des diocèses, institution canonique conférée sans l’intervention du Saint-Siège) ne peuvent s’accomplir sans l’intervention de l’Église, il songe moins à une négociation directe avec Rome qu’à un concile national qui, suivant le mot de M. Madelin, « ferait accepter au chef de l’Église quelques nouveautés. » Dans son intention, il s’agissait moins de combattre le contenu de la Constitution civile que d’« employer les formes qui peuvent en rendre l’exécution régulière. » Et pour qu’il n’y eût pas d’erreur sur ce point, il ajoutait : « Nous sommes loin de nous opposer à vos désirs quand nous vous proposons les seules formes qui puissent les remplir. »

Dira-t-on que Boisgolin n’engage que lui, qu’il est un prélat sans conséquence, un ambitieux sans considération ? Ce serait difficile. Boisgelin est un homme du meilleur monde, académicien, orateur réputé, formé à la pratique des hommes et des affaires, une des meilleures têtes du clergé, « le plus intelligent des évêques députés, » dit M. Madelin. Il n’est pas un courtisan de la Révolution, il a combattu la réunion des trois ordres. « Il se sentait fait pour les grands rôles, écrit M. l’abbé Sicard dans son Clergé de France pendant la Révolution, et ne fut inférieur à aucun. Il montrera durant la Révolution le coup d’œil, la décision et le courage qui font les hommes d’État. Il ne tiendra pas à lui que le terrible passage entre le monde ancien et le monde nouveau ne s’effectue sans effondrement et sans violence. »

Après la solennelle déclaration de principes formulée par Boisgelin au nom de ses collègues, aucun d’entre eux ne prit plus part à la discussion. C’est une question de dignité. Mais leur déclaration avait porté. Le Comité ecclésiastique avait proposé, pour ouvrir la porte aux transactions nécessaires avec l’Église et avec Rome, un dernier article ainsi conçu : « Le Roi sera supplié de prendre toutes les mesures qui seront jugées nécessaires pour assurer la pleine et entière exécution du présent décret. » Gobel, au nom des curés patriotes, insista vainement pour son adoption, en précisant que c’était non avec un concile mais avec Rome qu’il fallait s’entendre. L’article fut rejeté, non pas comme mal fondé à vrai dire, mais comme