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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 21.djvu/148

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la liquidation de ses biens. Fait encore plus significatif, tous les évêques députés prêtent (le 4 février 1790) le serment civique, qui constituait une approbation des décrets constitutionnels votés jusque-là. La plupart des autres les imitent. Certes il y a des dissidences. Plusieurs évêques ont déjà émigré, ceux de Pamiers et d’Apt les premiers, puis ceux d’Auxerre, de Saint-Omer, d’Arras, l’archevêque de Paris. D’autres, membres de l’Assemblée, n’y paraissent plus. Ceux qui restent, dénoncés par les intransigeans de droite et suspects aux intransigeans de gauche, n’en ont que plus de mérite. Ils se réfugient peu à peu dans l’abstention. Ainsi, les deux prélats qui faisaient partie du Comité ecclésiastique, les évêques de Clermont et de Luçon, s’en retirent lorsque le Comité est renforcé de quinze membres de gauche, le 7 février 1790. Même alors on ne peut dire cependant qu’il y ait rupture entre l’épiscopat et la Révolution. Le nonce à Paris, Dugnani, dans ses dépêches, estimait encore une conciliation nécessaire entre l’Eglise et la Révolution et déclarait que cette conciliation était réclamée par la majorité du clergé et de l’épiscopat. Or Dugnani, très lié avec l’abbé Maury, était de cœur avec la réaction ; ses informations, non conformes à ses désirs, n’en ont que plus de poids.

Pendant ce temps, le Comité ecclésiastique avait poursuivi son œuvre et préparé son projet de Constitution civile du cierge. Le rapport à peine déposé, l’épiscopat fait entendre ses protestations par la voix de l’archevêque d’Aix, Boisgelin, qui prononce, le 29 mai 1790, un discours publié ensuite avec des « Observations » complémentaires. Ce discours dont les conclusions, dit Boisgelin lui-même, ont été adoptées « par tous les évêques présens, » est très important pour déterminer le sentiment de l’épiscopat. Est-ce une condamnation pure et simple ? Un non possumus sans réplique ? Nullement. « Tout son effort, constate M. Mathiez, tendit moins à démontrer l’irrecevabilité des réformes proposées que l’impossibilité de les exécuter sans l’aveu et le concours de l’Eglise. » Le haut clergé était gallican, il n’aimait pas la Curie, il acceptait assez philosophiquement que le rôle du Pape dans la nomination des évêques fût réduit à sa plus simple expression. Mais la Constitution civile va plus loin. M. Lavisse reconnaît qu’elle « supprimait à peu près l’autorité du Pape sur l’Eglise catholique » de France. Boisgelin ne prononce même pas ce mot d’ « autorité. » Il parle