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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 21.djvu/664

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et une Bible hébraïque, avec les livres des étymologies qu’on rencontre parfois en Angleterre et en France, mais qui abondent chez les Hébreux et chez les Grecs, il donnerait, avec le texte véritable, une exposition assurée du sens littéral. Versé dans l’astronomie, il a aidé Roger Bacon à préparer la table latine. Aussi réunit-il toutes les conditions requises pour corriger convenablement la Bible : il sait le grec, l’hébreu de façon suffisante, la grammaire latine selon les livres de Priscien. D’après les textes on peut supposer qu’il a, des sciences, la connaissance exigée par Bacon de tout interprète, qu’il est un contemporain de Robert de Lincoln et d’Adam de Marisco. Il y a certes aussi quelques raisons d’identifier ce théologien et cet exégète avec Pierre de Maricourt, d’estimer que celui-ci connut les langues comme les sciences, qu’il travailla à constituer et à expliquer les Livres saints, comme à découvrir les secrets de la nature et à construire des œuvres merveilleuses. Mais il faudrait des argumens positifs pour établir solidement que maître Pierre fut théologien et exégète. Il nous suffit de savoir que Roger Bacon a eu deux maîtres qui lui furent d’un grand secours, l’un pour la recherche scientifique, l’autre pour l’étude des langues, pour la critique et l’exégèse sacrées. Les a-t-il grandis l’un et l’autre, a-t-il voulu tracer deux figures idéales, et en imposer l’imitation à lui-même et à tous ? Cela n’est pas impossible, mais il est incontestable qu’il a cherché à réaliser, autant qu’il l’a pu, l’idéal ainsi esquissé et présenté.


III

Roger Bacon n’a épargné ni l’argent, ni les peines pour se procurer les œuvres des maîtres qui l’ont précédé et pour les avoir correctes. Il sait l’hébreu et il propose, aux versions de l’Ancien Testament, des corrections qui laissent supposer la possession du texte. Mais il ne semble pas qu’il ait eu une connaissance spéciale de la littérature rabbinique, du Talmud qui provoqua, en présence de Blanche de Castille, les discussions célèbres et si funestes pour la communauté juive. On ne saurait dire, d’après les textes actuellement connus, s’il lut Ibn Gebirol et Maimonide, familiers à Guillaume d’Auvergne et à saint Thomas, dans les originaux ou dans les traductions.

Par ses œuvres, surtout par la grammaire grecque, nous