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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 21.djvu/904

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c’est dans cette région que le gouvernement de Tokio a obtenu trois concessions de chemin de fer ; deux lignes joindront deux points de la grande voie transmandchourienne avec Yao-Nanfou et traverseront des régions fertiles où la culture intensive du haricot soja est devenue une source considérable de richesses ; une troisième ligne descendra de Yao-Nanfou vers Jehol. Par leurs chemins de fer, par leurs consuls, par Port-Arthur et la presqu’ile du Liao-Toung, qu’ils tiennent à bail en vertu du traité de Portsmouth, les Japonais sont les véritables maîtres de la Mandchourie méridionale et de la Mongolie intérieure ; les Chinois les haïssent, mais ils sont impuissans à les repousser. En fait, la Chine est donc aujourd’hui presque réduite aux dix-huit anciennes provinces, tous les pays annexes sont, ou séparés, ou en voie de séparation. Ainsi, à la lumière de ces faits, s’éclaire l’attitude de la Russie et du Japon vis-à-vis de la révolution chinoise.

Les Puissances européennes et les États-Unis n’ont demandé à la Chine que des avantages économiques, des chemins de fer à construire, des mines à exploiter. Il faudrait une étude spéciale pour en entreprendre l’énumération. On n’y aperçoit pas de plan d’ensemble, l’initiative vient en général des banques ou des groupes financiers, qui s’intéressent beaucoup moins à la construction du chemin de fer qu’à l’emprunt qui doit servir à en couvrir les frais ; souvent une concession est demandée, puis revendue avec bénéfice sans aucun souci des avantages ou des inconvéniens politiques qui peuvent s’ensuivre ; une concession devient ainsi une valeur mobilière sur laquelle on spécule, et si elle peut rapporter de beaux bénéfices au « groupe » de spéculateurs qui l’obtient, on voit moins l’avantage qu’en espère la diplomatie qui en négocie l’octroi. Cependant les Allemands, dans le Chan-Toung et dans les régions limitrophes, apportent un remarquable esprit de méthode dans leurs demandes de concessions ; ils cherchent à créer un réseau de voies ferrées qui amènerait les marchandises, notamment les charbons et les fers du Chan-Si, à leur port de Tsing-tao. Les Anglais restent volontiers dans le bassin du Yang-Tse et y supportent sans bonne humeur la concurrence de leurs alliés japonais qui cherchent à y obtenir quelques lignes courtes mais productives (Kiu-Kiang à Nan-tschan, desservant la mine de fer de Ta-je qui alimente les fonderies du Japon). Les Français, souvent associés aux Belges, ont obtenu la concession d’un