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une Jeanne d’Arc (Salons de 1806 et de 1808). D’autre part, le luxe de l’Ancien Régime renaît à la cour de l’Empereur. L’architecture de Percier et de Fontaine se couvre de ces ornemens si méprisés par les fondateurs du néo-classicisme. Canova et Prud’hon retrouvent tout le charme du XVIIIe siècle. On sent l’influence de Joséphine, à côté de celle de Napoléon.

Enfin il faut dire que l’art que nous étudions ne disparait pas avec la chute de l’Empire. L’esprit de la Révolution a mis si profondément son empreinte dans l’âme française qu’il n’a cessé de régner jusqu’à nos jours. Pendant toute la première partie du XIXe siècle, quels qu’aient été les changemens dus à la monarchie, les souvenirs de la République et de l’Empire sont au fond des cœurs et ne cessent d’agir sur l’âge nouveau. La poésie de Victor Hugo y trouve ses sources les plus fécondes, et nuls sculpteurs ne représenteront plus intimement cet art qu’un Rude et un David d’Angers, ces maîtres qui ont si fièrement terminé la décoration du Panthéon et de l’Arc de triomphe de l’Étoile.

Sans insister davantage, nous chercherons, en étudiant successivement l’architecture, la sculpture et la peinture, à déterminer d’une manière un peu plus précise l’art si divers de cette grande époque.


§ II. — L’ARCHITECTURE

Quand on étudie l’histoire de l’art dans ses grandes divisions, s’il faut avant tout tenir compte des formes de la civilisation des peuples, des idées qui les dirigent et qui sont le fond même de toute chose, il y a des traits accessoires qui peuvent influer sur les arts et, parmi ces traits, un des plus notables dérive des matériaux que les hommes ont à leur disposition. Peu importante pour la peinture, cette influence est considérable pour la sculpture et l’architecture. Il est hors de doute que l’incontestable supériorité de la Grèce, dans l’art de la sculpture, lui vint de la qualité de ses marbres ; et les considérations tirées des matériaux sont non moins saisissantes, si l’on envisage l’évolution de l’architecture.

Si un pays possède des matériaux résistans, il sera conduit à les utiliser avec toutes leurs qualités ; il en fera, pour porter ses toitures, des supports isolés et légers. L’absence de belles pierres