Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 22.djvu/157

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

simple de Paris à Lyon payant 3 sous en 1625, 6 sous en 1703 et 8 sous en 1760, se trouve effectivement tarifée à 0, 90 centimes en 1625, 1 franc en 1703 et 0, 84 centimes en 1760. Le prix variait suivant les localités de 0, 50 centimes à 1 fr. 75 centimes ; mais il n’était pas exactement proportionné à la distance : il en coûtait davantage pour Strasbourg (1 fr. 70 centimes en 1703) que pour Marseille (1 fr. 20) ; Calais, à 1 franc, était plus cher que Nancy à 0, 85 centimes et le port était le même de Lille à Madrid, par l’ordinaire d’Espagne, que de Paris à Perpignan.

Les tarifs officiels ne nous donnent d’ailleurs qu’une idée peu exacte des frais de port qui incombaient à nos pères : les premiers tarifs n’entrèrent en vigueur que bien longtemps après leur promulgation, quelques-uns n’y entrèrent jamais : une lettre de Paris à Amiens coûte 2 fr. 50 centimes en 1657, tandis qu’elle était censée depuis des années devoir être taxée à 0, 50 centimes, et l’on paye 13 francs le port d’un arrêt du Conseil de Paris à Toulouse (1634) qui, d’après les pancartes, aurait dû se payer six fois moins. Le chiffre, inscrit sur la lettre au départ, était rayé souvent en cours de route par les maîtres de poste, qui exigeaient à l’arrivée un prix supérieur. Sans admettre toutes les exactions reprochées aux messagers, dont on se plaignait fort, il est certain que les ports sont plus élevés dans la réalité que sur les tarifs, et la raison en est fort simple : c’est que les tarifs ne concernaient qu’un petit nombre de villes, celles par où passaient les grands courriers, ou qui s’étaient reliées, par un piéton hebdomadaire et moyennant un supplément de 35 centimes, — le « droit de traverse, » — au bureau le plus voisin. Quant aux autres localités, chefs-lieux de canton ou communes rurales, le destinataire d’une lettre adressée « au maître de la poste de X…, pour faire tenir s’il lui plaît à Monsieur X… à tel endroit, » se voyait réclamer, pour de courts trajets, des taxes de 5 et 6 francs.

De Hollande, où il existait un service direct pour Paris, une lettre, une brochure, dès le milieu du XVIIe siècle, ne payait guère que 2 fr. 50 ; mais, de Paris à Montmorency, elle coûtait 3 francs, en 1760, à Jean-Jacques Rousseau, qui s’en plaint d’ailleurs amèrement comme des ports de lettres en général : « Ils le ruinent, dit-il, parce que tous les désœuvrés de France et de l’Europe lui écrivent et, qui pis est, exigent des réponses. » Mirabeau se voyait incapable aussi de payer les lettres qu’il