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« radicaux » a peut-être produit cette confusion. En tout cas, et comme on dit, « il n’y a pas d’offensé. » Appelons cette fois-ci de leur nom véritable Mme Matzenauer et M. Sembach. Au même théâtre, dans les rôles de Parsifal et de Kundry, les deux artistes furent, avec le chef d’orchestre, M. Weingartner, les plus insignes interprètes de ce qu’on appelle le Bühnenweihfestspiel wagnérien. Le reste de la représentation, musicale et plastique, témoigna souvent d’un goût contestable et d’une insuffisante préparation.

Le Barbier de Séville, ou mieux, beaucoup mieux, Il Barbiere di Siviglia, enchanta les oreilles et les esprits. N’ajoutons pas : et les cœurs, le sentiment et la tendresse n’ayant, on le sait, presque aucune part dans le chef-d’œuvre étincelant. Les mesures initiales et mineures de l’allegro de l’ouverture, quelques accens épars au cours de l’ouvrage, voilà toutes les traces, légères et furtives, d’une sensibilité qu’il appartint au seul Mozart de mêler, de fondre même avec la joie. Mais, pour la verve et l’abondance, pour le mouvement, l’éclat et la vie, il semble bien que nul autant que le Rossini du Barbiere, avant le Verdi de Falstaff, n’ait approché de Mozart. Opéra de chanteurs, ou pour chanteurs, nous disent aujourd’hui nos tâcherons de l’orchestre. J’attends que leur orchestre chante comme celui du Barbiere, qui chante toujours.

En fait de chant, de chant vocal, humain, choral, nous avons ouï des merveilles. Une compagnie glorieuse, et digne de sa gloire, l’Orfeò Català, a donné deux concerts, l’un au théâtre des Champs-Elysées, l’autre au Trocadéro. Si vous n’y assistiez point, vous ignorez ce que peut être, non pas un chœur, mais plutôt un admirable, un prodigieux orchestre de voix.


CAMILLE BELLAIGUE.