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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 22.djvu/233

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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




Les événemens marchent avec une si grande rapidité qu’il nous est impossible de les suivre d’un pas égal au leur : au moment où nous écrivions notre dernière chronique, M. Ribot était président du Conseil ; au moment où on l’a lue, il était remplacé par M. Viviani. Ces faits, qui sont d’hier, paraissent déjà lointains, mais ils poseront longtemps sur notre situation politique. Comment ne pas regretter que la courageuse entreprise de M. Ribot n’ait pas réussi ? On a beau dire que le programme de M. Viviani est le même que le sien, et cela a beau être littéralement exact, la différence des hommes en met une dans les choses, et c’est bien l’avis des radicaux-socialistes, puisqu’ils ont renversé le ministère Ribot pour faire la même chose que lui, en assurant qu’ils la feraient mieux. Mais nous n’en croyons rien. À la chute de M. Ribot, on a senti une diminution et, par malheur, cette impression, qui a été vive en France, l’a été encore plus au dehors. Nos amis se sont attristés, nos adversaires éventuels se sont réjouis ; ils n’ont même mis aucune mesure dans la manifestation de leur joie. C’est qu’un ministère qui avait à sa tête M. Ribot et qui comptait parmi ses membres MM. Bourgeois et Delcassé avait une belle allure. M. Ribot est aujourd’hui le plus illustre des parlementaires français : il a jeté un grand éclat sur la tribune de la Chambre et du Sénat ; aucune question ne lui est étrangère ; enfin il a été, avec M. de Freycinet, l’auteur de l’alliance russe. Le rôle qu’il a joué à la Conférence de la Haye a donné à M. Léon Bourgeois une notoriété européenne et même mondiale, et quant à M. Delcassé, il a inauguré avec l’Angleterre le rapprochement qui a été si solide et qui a repris le vieux nom d’Entente cordiale. Un ministère qui comptait ces trois hommes parmi ses membres inspirait considération et confiance. Mais la Chambre n’en a eu aucun souci et il ne lui a pas