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augmenter et discipliner nos forces. Ce n’était pas tout que d’avoir un immense réservoir où nous pourrions puiser en cas d’hostilités, il fallait que nos troupes prouvassent à l’Europe qu’elles étaient en état de bien remplir tous leurs devoirs. Et chacun a pu voir aux grandes manœuvres que notre armée manifestait une ardeur, un entrain, une intelligence et une endurance admirables.

La Russie, qui a été si éprouvée par la guerre japonaise, n’a pas hésité à imiter la France dans son relèvement militaire et à reconstituer ses forces en y employant le temps et en y mettant le prix nécessaire. « On connaît à l’étranger, écrivait récemment la Gazette de la Bourse dans un article qu’on a attribué au général Soukhomlinov, ministre de la Guerre de Russie, les énormes sacrifices que nous avons faits pour donner à l’alliance franco-russe une force réellement imposante. Les réformes militaires réalisées en Russie dépassent tout ce qui a été fait jusqu’à présent dans aucun autre pays. Le contingent annuel des recrues a passé de 450 000 à 580 000 hommes. Nous avons ainsi une augmentation annuelle de 130 000 hommes. Même la durée du service a été augmentée de six mois. Nous avons donc en hiver quatre contingens sous les armes. Aucune nation du monde ne peut se flatter de réunir une armée aussi considérable.

« Le chiffre de 580 000 multiplié par 4 donne 2 320 000. A titre de comparaison, il faut se rappeler que l’armée allemande, d’après la nouvelle loi militaire, compte 880 000 hommes, celle de l’Autriche-Hongrie, environ 500 000, et celle de l’Italie, environ 410 000.

« Il est tout à fait naturel que nous soyons en droit d’attendre que la France fournisse 770 000 hommes, ce qui lui est possible, grâce à la loi de trois ans.

« Il est nécessaire de faire observer que toutes ces augmentations d’effectifs en temps de paix ont été décidées exclusivement dans le but d’accélérer la mobilisation. À ce point de vue-là, nous avons réalisé une autre réforme considérable : nous avons projeté tout un réseau de chemins de fer stratégiques, dont on a déjà commencé la construction. De cette manière, nous avons tout fait pour prévenir toute anicroche en matière de mobilisation et pour pouvoir, dès les premiers jours de la guerre, accélérer le mouvement de l’armée vers les points de concentration.

« Nous désirons la même chose de la part de la France. Plus on aura de soldats, et plus rapide sera l’action.