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va avoir lieu se poursuivre en pleine liberté. » (Oui ! oui ! )

De nouveaux groupes pénètrent dans les tribunes. Un drapeau tricolore portant l’inscription : « 73e bataillon, 6e compagnie, » est arboré par les nouveaux venus. Gambetta reprend : « Dans les circonstances actuelles, il faut garder le calme. Vous pouvez donner un grand spectacle et une grande leçon. Le voulez-vous ? Voulez-vous qu’on puisse attester que vous êtes à la fois le peuple le plus pénétrant et le plus libre ? (Oui ! oui ! ) Eh bien ! si vous le voulez, je vous adjure d’accueillir ma recommandation que dans chaque tribune il y ait un groupe qui assure l’ordre pendant nos délibérations. » (Bravos et applaudissemens dans presque toutes les tribunes.)

Schneider croit venu le moment d’intervenir : « M. Gambetta, qui ne peut être suspect a aucun de vous, et que je tiens, quant à moi, comme un des hommes les plus patriotes de notre pays, vient de vous adresser des exhortations au nom des intérêts sacrés du pays. Permettez-moi de vous faire, en termes moins éloquens, les mêmes adjurations. Croyez-moi, en ce moment, la Chambre délibère sur la situation la plus grave. » Des rumeurs éclatant dans les tribunes, il s’écrie : « Je crois cependant pouvoir dire que j’ai donné à la liberté de mon pays assez de gages pour qu’il me soit permis de vous adresser, du haut de ce fauteuil, les mêmes recommandations que M. Gambetta. Comme lui, je ne saurais trop vous dire qu’il n’y a de liberté vraie que celle qui est accompagnée de l’ordre… (Très bien ! — Rumeurs nouvelles dans les tribunes.) Je n’espère pas prononcer ici des paroles qui conviennent atout le monde, mais j’accomplis un devoir de citoyen en vous conjurant de respecter l’ordre dans l’intérêt même de la liberté qui doit présider à nos discussions. »

De telles rumeurs accueillent ces recommandations que Palikao se lève et quitte la salle. Plusieurs députés imitent son exemple ; Schneider se couvre et descend du fauteuil. Sur les instances de la Gauche, il essaie cependant de reprendre la séance. Après quelques mots sans efficacité de Girault du Cher, Gambetta revient à la rescousse : « Citoyens (Bruit), il est nécessaire que tous les députés présens dans les couloirs et dans les bureaux, où ils ont délibéré sur la mesure de la déchéance, aient repris place à leurs bancs et soient à leur poste. Il faut aussi que vous attendiez, dans la modération et dans la dignité du calme, la venue de vos représentans à leurs places.