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était gentilhomme honoraire de la Chambre de Charles X, m’avait été recommandé. Il est étudiant au titre étranger et, loge précisément à Christ Church. Je n’avais pas au reste besoin de lui pour m’y reconnaître aussitôt qu’après avoir passé sous la tour qui contient la grosse cloche connue sous le nom populaire de Great Tom nous pénétrons dans la grande cour quadrangulaire. Dans l’angle à droite, l’entrée de la grande chapelle qui est en même temps la cathédrale où je me plaisais autrefois à aller entendre parfois l’office du soir que j’aimais parce qu’il ressemble beaucoup à nos vêpres ; dans le même angle, mais au premier, le Hall qui, disent avec orgueil les Oxonians, peut rivaliser avec celui de Westminster, et qui sert maintenant de salle à manger, toute garnie de portraits des bienfaiteurs et des illustres élèves du collège depuis Henry VIII et le cardinal Wolsey jusqu’à lord Rosebery, Gladstone et mon vieux doyen le docteur Liddell que je reconnais à sa couronne de cheveux blancs ; dans l’angle à gauche au contraire, les appartemens du doyen où j’ai demeuré. Précisément à ce moment, le doyen actuel se promène dans la cour, en robe avec un professeur. Je suis tenté d’aller à lui, de me faire connaître, et de lui demander si je ne pourrais pas visiter son appartement. J’aimerais revoir, non pas ma chambre dont je ne me souviens guère, mais la bibliothèque du docteur Liddell où je me souviens d’avoir eu des conversations intéressantes. En vrai doyen, le docteur Liddell avait quatre filles plus jeunes que moi. Je sais que l’une, qui était charmante, est morte, que l’aînée est mariée. Mais je voudrais savoir aussi ce que sont devenues les deux autres ; peut-être pourrait-il me le dire. Je suis sur le point de l’aborder ; puis, au dernier moment, une sotte timidité, comme si j’étais encore étudiant, me retient et je n’ose pas. Aussi me laissé-je conduire par mon jeune guide dans le petit appartement qu’il occupe au rez-de-chaussée d’une seconde cour qui fait suite à la cour quadrangulaire. Cet appartement, qui se compose de deux pièces très confortables, — il y a des appartemens d’étudiant qui en ont jusqu’à trois, — me rappelle ceux où, il y a cinquante et un ans, dans d’autres collèges, j’ai passé quelques agréables momens avec mes compagnons d’Université d’alors. Plusieurs ont disparu après avoir fait quelque bruit dans le monde, comme le duc d’Hamilton. D’autres ont survécu et sont arrivés aux situations les plus considérables, entre autres celui