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différence extérieure ne traduise pas certains changemens dans la vie intérieure. Les tramways, les autobus, les automobiles, et je ne parle pas des bicyclettes, l’ont rendue presque tumultueuse. Sans doute, en s’écartant des grandes artères telles que High Street et Corn Street, en s’égarant dans les petites rues, en pénétrant dans la cour des collèges, on retrouve le silence et la solitude. Mais autrefois le silence et la solitude venaient au-devant de vous. Ces exquises Sensations d’Oxford que j’ai relues à cette occasion, où le charme silencieux et le recueillement de la ville universitaire sont si bien rendus, Bourget ne les écrirait plus. Oxford est envahi par le modernisme urbain. Il ne faut point bouder à cette transformation. Chaque époque a sa marque distinctive. Le mouvement, l’intensité de la vie sont la marque de la nôtre, et le mouvement, la vie, ont bien leur prix. Mais lorsqu’on est soi-même en dehors du mouvement et è la marge de la vie, il est impossible de se défendre, à la vue de ces changemens, d’une impression quelque peu mélancolique. Aussi, tout en roulant vers Londres où je vais retrouver une vie encore plus intense, je ne puis m’empêcher de me répéter à demi-voix, dans mon wagon solitaire, ce vers de Tennyson :


Death in life, things that are ne more
C’est la mort dans la vie, les choses qui ne sont plus.

HAUSSONVILLE.