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LA FRANCE EN ÉGYPTE

A la suite des arrangemens que notre politique marocaine nous a amenés à faire avec l’Angleterre, il y a une dizaine d’années en Egypte, notre situation a naturellement et rapidement décru dans ce pays que nous avons arrosé de notre sang et que nous avons fécondé aussi de notre génie en ouvrant dans son sol la grande voie maritime qui a fait de lui une escale de la route commerciale la plus importante du monde ; mais il ne s’agit ici que de notre situation politique, et non pas de notre situation morale, ni de notre action civilisatrice et éducatrice, qui, malgré les difficultés de l’heure présente, sont restées très grandes et peuvent le redevenir davantage.

Aux Français qui seraient tentés de renoncer, là-bas, à tout avenir pour leur pays, je conseillerais volontiers d’aller passer un hiver aux rives enchantées du Nil et d’ouvrir leurs yeux et leurs oreilles :

Je me souviens, moi-même, de mon agréable surprise, lorsque, il y a trois ans, j’abordai pour la première fois en Egypte : j’y venais avec la secrète inquiétude de me sentir en possession très insuffisante de la langue anglaise que j’y croyais indispensable. Et à peine débarqué, à Alexandrie, au Caire, à Port-Saïd, dans toutes les grandes villes, je découvrais les traces d’un véritable monde français juxtaposé au monde arabe.

Partout, en effet, à côté de l’idiome national, s’affirme la souveraineté parallèle de notre langue. Elle résonne dans les rues, dans les théâtres, aux terrasses des cafés. Elle s’étale aux