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Comme la plupart des écrivains contemporains, comme Bonald, Joseph de Maistre, Chateaubriand, Rivarol, Mme de Staël, il flétrit avec la dernière énergie la Terreur, tyrannie « d’autant plus insouffrable, d’autant plus exécrable qu’elle était exercée par la portion la plus vile, la plus corrompue, la plus ignorante de la nation ; » « ces assassinats juridiques,  » froidement commis par « des bourreaux et des charlatans politiques,  » tout ce sang versé lui parait « suffire à éteindre tous les bûchers allumés par la féroce Inquisition, comme il sert à en effacer la mémoire. » De ces maux les « philosophes » sont pour une large part responsables ; ce sont eux qui ont jeté dans le peuple « des germes d’insubordination, de haine pour tout pouvoir supérieur, de mépris pour une religion si consolante pour les gens de bien, si nécessaire pour arrêter le bras du méchant. » « Eh quoi ! s’écrie Maine de Biran, nous aurons toujours à gémir sur le sort de l’humanité ? Elle est dans l’esclavage. Son abrutissement excite notre pitié. Brisez ces fers : les excès, les désordres auxquels elle se livre nous percent l’âme. Nous voudrions la priver encore de cette liberté dont elle fait un usage si funeste ! » Combien d’échos ces trop justes plaintes n’auraient-elles pas pu réveiller dans les urnes d’alentour !

Ce n’est pas d’ailleurs qu’il ait perdu toute foi dans la philosophie pour améliorer les mœurs et la condition humaines : « Oh ! que n’avons-nous, dit-il, des écoles publiques de sagesse comme les Grecs ! Que n’y a-t-il des Socrate, des Platon dans quelque lieu de la terre ! J’abandonnerais tout, je renoncerais à tout pour les suivre et me rendre digne d’être leur disciple… Qui est-ce qui n’aimerait pas la vertu prêchée par Socrate… » A défaut de Socrate ou de Platon, il lit et relit Montaigne, Mably, Rousseau, Pascal et Fénelon :


Pascal, dans ses Pensées morales, élève mon âme, mais lorsqu’il parle de religion, il ne la rend pas aimable : son tempérament mélancolique perce partout ; s’il jette quelquefois du sublime dans ses conceptions, il y répand trop souvent du sombre. O bon Fénelon, viens me consoler ! les divins écrits vont dissiper ce voile, dont ton janséniste adversaire avait couvert mon cœur, comme la douce pourpre de l’aurore chasse les tristes ténèbres. Mais que seraient tous ces écrits, gloire de notre siècle, devant les leçons d’un Socrate !…


À cette phraséologie, ? on reconnaît un fils du XVIIIe siècle. De